Act in 2001

Effervescences

d'Lëtzebuerger Land vom 08.11.2001

Difficile de l'immobiliser une demi-heure pour discuter un peu du projet. Jean-Paul Maes, le directeur artistique de la première biennale Act In, Festival européen de la création théâtrale, bataille sur tous les fronts. Car au-delà de la direction du festival, il met également en scène une des pièces, Kitsch de Nico Helminger, pièce de clôture du festival dont la première représentation aura lieu le 17 novembre à la Kulturfabrik à Esch. Et en plus, Jean-Paul Maes y incarne un des rôles dans une des dix saynètes. 

Car il est fan des pièces de Nico Helminger, « pour moi, il est un des auteurs les plus importants aujourd'hui au Luxembourg, » estime-t-il. Kitsch a été écrit en 1999 et décrit une société luxembourgeoise proche de l'abîme, qui va tout droit vers sa perte. « Pour moi, c'est une pièce impalpable parce qu'elle décrit une société devenue elle aussi irréelle. » Kitsch sera joué à la Kulturfabrik à Esch, produite par l'Association pour la promotion du théâtre contemporain (APTC) en collaboration avec la Theater GmbH.

L'APTC, c'est l'association de Jean-Paul Maes qui organise le festival Act In dont le grand mérite est d'avoir su fédérer tous les théâtres du Luxembourg (à l'exception de celui des Casemates), plus Arlon, plus Trèves, pour qu'ils montent chacun une des pièces proposées par l'APTC en tant que production de la rentrée. Les pièces, choisies par Jean-Paul Maes et un comité de lecture, sont des pièces contemporaines d'auteurs vivants, écrites dans une langue dite minoritaire - soit le catalan, le finnois, le slovène, l'ukrainien, l'estonien ou le luxembourgeois - qui sont ainsi souvent créées dans leur traduction dans le cadre d'Act In. Et ce sont des pièces politiques, parlant des nouveaux rapports de force en Europe, douze ans après la chute du mur de Berlin. Ce n'est pas tous les jours que le théâtre revendique son engagement politique au Luxembourg, « je trouve que bien trop souvent, le théâtre reste isolé du monde, regrette Jean-Paul Maes, et pourtant, il est toujours politique. »

Act In, dont l'ouverture officielle a été donnée mercredi à Esch avec la première de la performance Eat it ! de Serge Tonnar (Maskénada), suivie de Vladimir du Slovène Matjac Zupancic, sera donc accompagné d'un programme de débats et de discussions. Ainsi, la journée de demain, samedi, sera entièrement consacrée aux rencontres entre les auteurs (à 10h30) et aux débats politiques (les influences culturelles et politiques de l'Europe sur le Proche-Orient, à 20 heures) au château de Bourglinster. Le 15 novembre aura lieu à 18 heures à la Villa Pauly un débat intitulé Où commence la terreur ?, en préparation de la première, le lendemain, de Ana-Lena Blumfeldts Schmetterlingsschatten, création d'une pièce de Michel Grevis (en allemand) qui raconte l'éveil sentimental d'une adolescente juive durant la deuxième guerre mondiale (mise en scène : Jacqueline Posing, production : Théâtre national).

« Dès que j'ai entendu parler de l'idée de ce festival, j'étais enthousiaste, » se souvient Marc Olinger, directeur du théâtre des Capucins qui y met en scène Saut à l'élastique de l'Estonien Jaan Tätte (première représentation : ce soir). Après avoir été beaucoup montée en Allemagne sous le titre Bungee Jumping, la pièce sera ainsi créée en français au Grand-Duché (ce qui peut être un bon argument pour la présenter plus tard par exemple à Avignon). Racontant une histoire qui n'est pas sans rappeler le film Indecent Proposal (Adrian Lyne, USA, 1993) - un homme propose beaucoup d'argent à un couple pour pouvoir passer la nuit avec la jeune femme -, le titre Saut à l'élastique pourtant se rapporte plus à la forme de la pièce qu'au contenu. « C'est ce qui m'a intéressé, affirme Marc Olinger, l'auteur joue avec le public, changeant en permanence de style, passant de la comédie au drame, du théâtre psychologique au policier ou au conte fantastique. » 

Si le théâtre des Capucins produit entièrement Saut à l'élastique, les petites troupes privées comme le Théâtre ouvert Luxembourg ou Spektakel de Jhemp Schuster n'en auraient pas eu les moyens. Les 7,3 millions de francs de budget du festival ont été entre autres utilisés pour contribuer au financement de leurs productions. Ainsi, Nicolas Steil a mis en scène Combat, « une pièce sur la guerre » du Catalan Carlos Battle Jordà au TOL (première représentation le 12 novembre) et Andrej Kritenko monte Lügner de l'Ukrainien Olexandr Irwanetz pour l'asbl Spektakel (première le 11 novembre à l'ancien hall de marchandises des CFL, route de Thionville) alors qu'au Centaure, Serge Wolf met en scène Kaapi / Le placard du Finlandais Marko Leino (première représentation le 14 novembre). 

Reste la grande question pour le spectateur : où donner de la tête ? Car durant dix jours, on pourrait « se faire une première » tous les soirs. Le choix est d'autant plus difficile que les pièces sont contemporaines, souvent écrites par de jeunes auteurs, donc la littérature secondaire manque encore. Il faudra donc prendre des risques, une toute nouvelle pratique pour les théâtreux luxembourgeois...

L'information sur les pièces participant à Act In n'est pas centralisée ; à l'heure où nous mettons sous presse, l'adresse Internet www.aptc.lu n'est toujours pas activée. Donc, pour tout renseignement ainsi que pour les réservations, il faut téléphoner aux théâtres en question : Esch : 54 03 87 ou 54 09 13, Capucins : 22 06 45 ; Casemates : 29 12 81 ; Centaure :  22 28 28, TOL : 49 31 66, Kulturfabrik : 55 88 26.

josée hansen
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