Lundi au Cinémaacher, qui fait partie intégrante du Kulturhuef et compte parmi les cinq cinémas du réseau CDAC (Centre de diffusion et d’animation cinématographique). Pas de séance aujourd’hui, mais du travail quand même. Vérifier les notes des projectionnistes qui ont éventuellement détecté quelques problèmes techniques, comme une climatisation trop bruyante ou un volume sonore trop faible émis par les amplificateurs, assembler les chiffres des différentes séances et les envoyer aux distributeurs.
Bien évidemment, ces petits cinémas ne peuvent pas concurrencer le nombre d’entrées dans les grands multiplexes du pays. Une douzaine de fidèles pour les films arts et essai montrés sous le sigle ciné-club, un nombre très variable, selon les vedettes et la date de sortie en région, des blockbusters. Les films qui remplissent le plus régulièrement les 80 places de la salle sont les films pour enfants. Car pour les familles, les avantages du cinéma de proximité sont les plus évidents : pas de longs trajets à parcourir, possibilité de parking à quelques mètres de la salle et surtout des prix d’entrée moins élevés.
Tous les lundis, le Cinémaacher envoie également sa newsletter et met à jour le programme sur internet. Un des employés du Kulturhuef récolte alors les informations nécessaires (synopsis, photos et bandes-annonces) avant de procéder à la mise en page.
Mardi, une séance scolaire prévue pour 15 heures. Deux classes d’une école fondamentale du sud du pays concluent leur excursion à la Moselle par une séance d’un film d’animation. Cette fois, l’organisation de la séance ne posait pas de difficultés : le film était de toute façon prévu dans la programmation de la semaine et la copie donc disponible, contrairement à d’autres occasions où des enseignants appellent avec une idée précise, mais malheureusement trop tard. Car le circuit des copies entre les cinémas régionaux est prévu quelques semaines à l’avance et les films actuels trop convoités pour qu’une salle puisse se permettre de les garder plusieurs semaines d’affilée. Un film moins récent est plus facilement disponible, mais nécessite une demande préalable de deux à trois semaines auprès des distributeurs. Des négociations que le CDAC a confiées aux programmateurs d’Utopia SA située à Luxembourg-Ville, ce qui conduit d’ailleurs souvent à la fausse perception que les cinémas CDAC seraient en fait des cinémas Utopia.
15h45. La séance solaire est finie et les élèves viennent de quitter la salle. Pendant que le projectionniste s’affaire dans la cabine, un autre membre de l’équipe fait un tour rapide de la salle, pour ramasser les ordures ou détecter des objets oubliés. Une armoire du bureau abrite d’ailleurs une petite collection d’écharpes, de bonnets et d’autres accessoires jamais réclamés. D’où l’importance d’un contrôle immédiat, qui laisse encore la chance de courir éventuellement après leurs propriétaires.
Une autre séance à 20 heures. Dans une salle remise en état se déroule la troisième et dernière projection du film grand public de cette semaine. Le beau temps se ressent dans le nombre de spectateurs. Mais c’est le jeu.
Mercredi. On est dans la deuxième moitié du mois. Temps de penser au planning des bénévoles pour le mois à venir. En effet, la douzaine de projectionnistes et les 17 caissiers et caissières qui se relayent pour les cinq à sept séances par semaine sont des bénévoles recrutés parmi des locaux et amis de longue date de la maison, mais aussi parmi des candidats qui se sont présentés spontanément ou suite à des appels lancés par mailing. Lycéens, ouvriers, instituteurs, hommes, femmes, retraités : l’éclectisme qui caractérise l’équipe est enrichissant.
Une séance ciné-club à 20 heures. Le cinéma art et essai attire aussi moins de monde dans les cinémas régionaux. Pas de surprise de ce côté-là. En revanche un élément semble encore nettement plus déterminant dans ces derniers : la question de la langue. « C’est un bon film, mais je préfère me concentrer sur le son et l’image, plutôt que sur les sous-titres » ou bien « Je ne paierai pas pour entendre Nicole Kidman parler l’allemand » : la question du doublage divise les spectateurs avec des arguments valables des deux côtés. Le cinéma numérique, dont les cinémas régionaux ont prévu l’installation dans le futur proche, remédiera à la pénurie de copies doublées, que les puristes accueilleront à leur tour avec frustration.
Jeudi. Pas de séance aujourd’hui, car les copies seront démontées. Un long-métrage à durée normale est généralement découpé en deux bobines, un film à longueur exceptionnelle en trois. Celles-ci sont emballées dans des boîtes spécifiques pour continuer leur chemin dans le circuit. De même pour les affiches.
Les premières réponses au planning envoyé la veille arrivent par fax ou par mail. Chaque bénévole a ses habitudes et ses préférences, selon son activité professionnelle et ses goûts cinématographiques. En effet, à la différence d’une équipe professionnelle, le contact avec les volontaires est plus personnel et plus immédiat. Un cinéma régional comme le Cinémaacher survit aussi grâce à la flexibilité et la passion de ses bénévoles. Par conséquent, le contact avec le public est lui aussi différent. Ici, il y a plus de chances que la caissière et le spectateur se connaissent et papotent quelques instants avant qu’une autre connaissance vienne se joindre à la discussion. C’est le moment où la notion de cinéma de proximité prend son deuxième sens.
Vendredi. C’est le début d’une nouvelle semaine de programmation. Mais il faut déjà confirmer celle de la semaine d’après et créer son affiche qui sera distribuée dès aujourd’hui. Un contact est établi avec un jeune réalisateur luxembourgeois pour une séance spéciale de son film en sa présence. Un projet qui se réalisera dans un mois. Sinon, tout est prêt pour ce week-end, qui s’annonce mieux en termes d’entrées, car le soleil quant à lui, ne sera pas au rendez-vous.