Engloutis les parkings. Ravagées les archives. Inondés les serveurs. Ce qui se trouvait au sous-sol d’institutions financières de la Cloche d’Or, rue Eugène Ruppert, a été détruit par des inondations d’une envergure sans précédent, matérialisation du dérèglement climatique. Les compagnies d’assurance, banques et fonds d’investissement ont maintenu tant bien que mal leurs activités. Les connexions principales ayant été rompues, des circuits alternatifs ont été empruntés. Certaines ont dû réadopter le fax pendant quelques heures. Les directions ont enclenché les plans de continuité des affaires. Ceux-là se sont révélés d’autant plus faciles à appliquer que bon nombre de salariés travaillaient déjà depuis leur domicile à cause de la pandémie de Covid-19. Les affaires des clients internationaux de ces établissements continuent de tourner. En revanche, la restauration déguste. Oberweis et le Comptoir Bohême maintiennent le rideau baissé. Comme au plus fort de la pandémie, les services financiers se maintiennent à flot quand le commerce sombre. Ils ont fait de l’extraordinaire la norme.
La ministre de l’Environnement Carole Dieschbourg rappelle à propos que la fréquence d’épisodes météorologiques de cette amplitude augmente. Au cours d’une conférence de presse organisée lundi matin, l’élue écologiste et ses fonctionnaires indiquent en outre que l’alerte au risque d’inondation avait été lancée la veille, le mardi. Mais à qui ? Au nombre de lave-linges jonchant les trottoirs des quartiers de la capitale où passe l’Alzette, le message est mal passé. Voilà même un fail monumental. L’application Gouvalert développée après les inondations destructrices de 2018 dans le Müllerthal a échoué dans sa mission d’informer sur ces événements menaçant la sécurité publique. La seule notification apparaissant sur l’application (qu’il faut avoir téléchargé) a été émise à 23h58 le mercredi soir, soit après que l’eau avait atteint les habitations. Pratique. Le wort.fr soulignait d’ailleurs dès le jeudi matin ce retard à l’allumage, « huit heures après l’alerte rouge émise par MétéoLux et le SMS envoyé par le CGDIS transmis à tous les bourgmestres ».
Ironie du calendrier, le Premier ministre Xavier Bettel (DP) a signé le jour des inondations un accord scellant l’installation d’une e-ambassade de Monaco à Luxembourg afin d’y stocker les données de valeur de la Principauté au Grand-Duché. « Un projet qui ne pouvait s’envisager en Principauté, par le risque de catastrophe naturelle », écrit naïvement le journaliste de Monacotribune en ce début de semaine. Très bien. Mais il serait aussi temps de dépasser ces effets d’annonce et de rapprocher les opportunités technologiques des citoyens. Vendre la start-up nation à l’étranger et ne pas être capable d’envoyer un sms à ses habitants en danger est un grand-écart devenu intenable. Et au fond, pour eux comme pour les entreprises, le seul plan de continuité des affaires qui tienne, c’est une meilleure prise en considération des problématiques environnementales. Le malheureux Epternacien employé de Cargolux (champion national d’une industrie non-durable) portraité dans le Wort lundi pour avoir dit adieu à sa voiture douze heures après l’avoir achetée incarne d’ailleurs la difficile conjugaison de l’idéal matérialiste et de la contrainte écologique.