Ils sont tous deux originaires de Metz, ils y ont tous deux fait leurs classes, mais dans deux écoles hôtelières différentes, ils ont tous deux été formés par de grands maîtres dans les plus grands restaurants de la métropole française – et ils se retrouvent tous deux au restaurant gastronomique du Casino de Mondorf, le très suave et guindé Les Roses, riche déjà d’une étoile Michelin. Pas mal pour un Casino.
Rencontrer le chef Alain Pierron et le chef sommelier Thierry Corona, c’est rencontrer deux passionnés, deux hommes investis et impliqués qui ont le même souhait de « démocratisation » de la haute gastronomie. Celle-là même qui désormais n’hésite plus à s’afficher en prime-time dans les programmes de télé-réalité de bien des pays. « Je veux faire plaisir à un panel de clients plus large, plus jeune, et peut-être moins fortuné, » explique Alain Pierron.
« Grâce à un travail en amont sur les fournisseurs que je trouve directement sans passer par des intermédiaires, je fais des économies de temps et d’argent tout en travaillant avec de la qualité. Cette économie, la direction me donne l’opportunité de la répercuter au client. On travaille tous dans la même direction, c’est très motivant. » Le résultat est une nouvelle formule de menu découverte qui tourne autour de cinquante euros et qui, bien sûr, change régulièrement.
On assiste à Mondorf comme ailleurs à une véritable révolution gastronomique, où la cuisine se veut désormais accessible à chaque gourmand et non plus réservée à une élite argentée qui s’habillait en tenue de soirée pour dîner il y a encore quelques années. « Les clients ont changé, c’est vrai, reconnaît Thierry Corona, l’œil pétillant. Autrefois, c’était très classique. On n’envisageait pas un grand repas sans des produits de luxe accompagnés de vins renommés, tels que des grands bourgognes blancs ou des bordeaux. Depuis cinq ans à peu près, tout cela s’est décontracté, on cherche plus la découverte, on n’hésite pas par exemple à déguster des vins de Corbières, on ose manger du maquereau, de la sardine… Ce qui compte désormais c’est l’excellent rapport qualité/prix. C’est mon but maintenant. Il faut obtenir la confiance avec le client, et l’étonner par ses choix. Voilà pourquoi j’aime mon métier, pour ces vins découvertes qui s’invitent sur les grandes tables ».
Et pour des curiosités de ce genre, le président de l’association des sommeliers d’Europe préconise le vieux continent. « Il s’agit d’être solidaire des vins d’Europe, comme par exemple les vins de la Moselle dont la qualité mérite désormais d’être reconnue à plus large échelle, ou encore les vins de Géorgie, à redécouvrir ». Cela passe pour lui par une formation des sommeliers qui se doit d’être parfaite après l’école par de nombreux stages auprès des métiers qui gravitent autour du vin et de la vinification. Le sommelier européen doit tout connaître de la mise en bouteille, s’investir à fond et surtout ne pas hésiter à s’exporter en Europe. « Je veux faire l’Union européenne du vin » assène-t-il finalement dans un sourire chaleureux.
La collaboration entre Alain Pierron et Thierry Corona ne date pas d’hier, la complicité entre les deux hommes est palpable. Tous deux travaillent ensemble aux « Roses » au sein d’une équipe soudée depuis plus de dix ans, même si Alain Pierron n’est passé aux commandes de la cuisine que depuis un an et demi.
Les deux hommes s’apprécient et se respectent. « Je lui montre ma carte de saison, et lui y associe des vins. C’est toujours judicieux, raconte Alain Pierron, mais attention, on ne travaille pas qu’à deux, on est toute une équipe. C’est très important de le dire. Lui comme moi pouvons compter sur nos assistants. »
Entre tradition et modernité, les deux hommes suivent la même quête, celle de l’accord parfait. Et le client jeune et moderne en redemande.