Un sujet explosif, dans le sens premier du terme, fut sa première correspondance d'actualité pour la Radio socioculturelle (RSC) 100,7 en automne 1993 : le premier attentat à la bombe par correspondance qui a défrayé la chronique en Autriche. Ce sont des choses qui marquent. Monique Muller était alors encore étudiante en journalisme au Institut für Publizistik und Kommunikationswissenschaft, se préparant à une carrière dans la presse écrite « parce que j'aimais lire et écrire des histoires. » Un stage l'a menée à la radio socioculturelle, les correspondances autrichiennes l'y ont attachée, puis elle s'est « rendue compte que la radio est plus mon truc, parce que c'est plus complet, qu'on peut y combiner les genres : faire des interviews, les monter, écrire ses textes, puis aussi les présenter ».
Depuis un an à peu près, Monique Muller présente le journal du soir du 100,7, tous les jours en semaine à 18 heures. Durant les quatre ans de ses débuts, jusqu'à ce que RTL libère la fréquence le matin, en mai 1997, c'était le seul bulletin d'information de la RSC. La soirée reste un créneau considéré par beaucoup d'autres radios comme peu porteuse, la plus grosse, RTL semblant de plus en plus abandonner ce créneau au profit de la télévision. Ce qui devient, forcément, un argument pour écouter la demie heure de Panorama pour savoir ce qui s'est passé lors d'un congrès politique, à la Chambre des députés, lors d'une conférence de presse de la journée.
Monique Muller estime que leur mission à eux, c'est d'offrir une réelle alternative, un complément aux radios commerciales, avec plus d'analyses, des informations plus exhaustives et approfondies - même si, en 1997, les équipes n'ont pas été élargies proportionnellement au nombre d'heures d'antenne. Donc forcément, une équipe toujours limitée - une dizaine de journalistes - doit assurer plus de temps d'antenne.
À 31 ans, Monique Muller fait partie de cette génération de journalistes sortis de fac au début des années 1990, durant les années de construction des nouvelles radios, après la libéralisation du paysage radiophonique de 1991, lorsque soudain, il y avait d'énormes débouchées en journalisme. Pourtant peu d'entre eux sont restés : elle se rappelle par exemple ses débuts avec Sophie Morang, Carlo Schneider et Steve Staudt - une équipe dont seule la première travaille encore à la radio socioculturelle, les deux autres se sont réorientés vers l'économie privée. « À l'époque, la radio socioculturelle était très intéressante, parce que c'était un grand chantier, où tout était à inventer. En plus, nous étions une équipe très jeune, la solidarité et le sentiment de participer à un projet exceptionnel nous liait tous, » se rappelle-t-elle.
Aujourd'hui, la présentation du journal du soir lui convient à merveille, parce qu'il correspond à son rythme, « je ne suis pas très matinale ». « Le direct me donne toujours le kick ! se réjouit-elle. J'ai besoin de ça, je crois que le jour où je n'ai plus cette poussée d'adrénaline à l'antenne, j'arrête ». Conteuse d'histoires, elle considère son journal comme un produit complet, s'amuse à définir la hiérarchie des sujets, à écrire les lancements, les transitions et les relances tout en restant rapide, précise et objective, les trois maîtres mots du journalisme radiophonique selon elle. « J'aime raconter des histoires aux gens, j'essaie de tourner mes reportages et mes journaux de façon à ce qu'ils accrochent l'auditeur, de présenter les sujets comme quelque chose de passionnant. Je crois que chez nous, on a vraiment la possibilité de raconter le monde. » Les journalistes de l'audiovisuel sont en plus les seuls à exercer le métier en leur langue maternelle.
On la dirait vamp, mais en fait elle est très timide. On la croirait mannequin ou artiste, avec ses grands cheveux bouclés teints en rouge, mais elle est sobrement journaliste. Plusieurs fois déjà, son nom a été cité dans les couloirs de RTL, lorsque la généraliste commerciale cherchait de nouveaux collaborateurs, notamment à la télévision. C'est vrai qu'une fois elle a fait des screen tests, parce qu'elle était trop « arty », on lui avait fait un joli chignon, lui donnant un air bien plus sage ; elle en garde un bon souvenir, cela s'était bien passé, mais il n'y a pas eu de suites.
En fait, la radio publique lui plaît toujours, car elle y trouve « une certaine liberté », peut couvrir les sommets européens, sa grande passion « pour la dimension internationale, parce que cela nous fait sortir un peu du carcan national, parce qu'on y rencontre des confrères européens » Puis ici, au 100,7, elle apprécie l'ambiance, ses collègues et les collaborateurs de la radio, souvent artistes eux-mêmes, ou pour le moins créatifs.
Et après la radio ? « Si jamais j'arrêtais, j'aimerais faire quelque chose de vraiment créatif, quelque chose de plus palpable. Trouver le temps et le calme nécessaires pour écrire un livre ». Continuer à raconter le monde.