Il y a un an, rien ne semblait pouvoir arrêter l’avancée triomphale d’Apple, qui, après avoir popularisé son balladeur, l’iPod, battait des records de vente avec son téléphone portable, l’iPhone, tout en se préparant à lancer son terminal tactile, l’iPad, lui aussi promis à un remarquable succès commercial. Ce faisant, Apple parvenait à dépasser Microsoft en capitalisation boursière. Mais Google, qui annonçait en novembre 2007 un système d’exploitation pour terminaux mobiles à écran tactile, Android, a battu Apple sur ce terrain. Android allait finir par faire mieux que l’iPhone d’Apple et que le Blackberry du Canadien RIM. Après que le premier téléphone Android, le HTC Dream, a été commercialisé à l’automne 2008, les statistiques du premier semestre 2010 sont sans appel : pendant cette période, Android équipait 33 pour cent des smartphones vendus aux États-Unis, contre 30 pour cent pour Blackberry et 22 pour cent pour l’iPhone.
Contrairement à ces deux systèmes, Android est en Open Source, plus précisément sous licence Apache. Il est géré par un consortium appelé Open Handset Alliance. Son code peut donc être examiné en détail par tout développeur. Il existe, comme pour l’iPhone ou pour le Blackberry, un catalogue en ligne d’applications compatibles, mais contrairement à ceux de ses concurrents qui filtrent sévèrement les applications candidates, l’App Store d’Android est géré de manière très libérale par Google. Il compte 70 000 applications, contre 225 000 sur celui de l’iPhone.
Assurément, la démarche de Google est bien différente de celle d’Apple sur le marché porteur des terminaux mobiles. En plus d’avoir choisi l’Open Source, le géant de Mountain View a aussi misé sur des accords de coopération avec différents constructeurs, alors qu’Apple, dont personne ne s’attend certes à ce qu’il coopère avec d’autres firmes de hardware, a systématiquement joué la carte de l’exclusivité avec les opérateurs de télécommunications.
Est-ce la caractéristique Open Source qui explique le succès d’Android ? Difficile de l’affirmer. En tout cas, elle n’a en rien gêné l’impressionnante progression des ventes de smartphones de type Android. Ce qui y a aussi beaucoup contribué, c’est la rapidité et l’efficacité constatées en matière d’ajout de fonctionnalités et la prise en compte de nouvelles technologies. Alors que Linux, le système d’exploitation Open Source qui défie Windows depuis des lustres, a toujours eu du mal à suivre de ce côté-là. De l’avis général, après des débuts qui ont quelque peu effrayé les développeurs, Android est aujourd’hui un système d’exploitation performant et efficace, remarquablement rapide et en phase avec les innovations proposées par les fabricants de hardware et les concepteurs de réseaux, avec par exemple la possibilité de faire de son téléphone un mini-hotspot WiFi.
Avec tous les constructeurs qui ont adopté Android pour des appareils très différents, il était inévitable que des versions différentes du système d’exploitation coexistent. C’est là un de ses désagréments. Google loue les qualités de la dernière version en date, la 2.2, également connue sous le nom Froyo (pour « frozen yoghourt » – les précédentes s’appelaient Eclair, Donut et Cupcake), alors que bien des utilisateurs sont coincés avec des versions antérieures et empêchés de bénéficier des améliorations et ajouts les plus récents.
Un des atouts d’Android est la remarquable intégration des applications Google telles que Gmail, Google Earth ou Google Voice. Il suffit au propriétaire d’un smartphone Android de renseigner une seule fois les identifiants d’un compte Google pour lancer la synchronisation et la personnalisation de son appareil. Cette facilité peut aussi être présentée comme un des dangers du système Android : alors que certains s’inquiètent de l’emprise grandissante de Google sur les données personnelles de beaucoup d’internautes, Android revient à étendre celle-ci à ses déplacements, contribuant à faire encore davantage de Google un effrayant Big Brother.