Jazz Guitar Duo with Marc Demuth. Voilà un titre qui a le mérite d’être clair et qui ne s’embarrasse pas de fioritures. Pour sa quatrième sortie discographique, le guitariste Greg Lamy délaisse son quartet, le temps de cette escapade et « touche à l’art du duo ». Comme compagnon d’armes, son dévolu s’est jeté sur Paulo Simoes, rencontré à Bruxelles et collaborateur régulier depuis 2006. Le guitariste d’origine lusitanienne n’est pas le premier venu puisqu’il accompagne, entre autres, la plus luxembourgeoise des chanteuses de fado, Raquel Barreira.
Sur la moitié des morceaux choisis, on retrouve Marc Demuth à la contrebasse. Quant à la sélection proprement dite, la priorité a été donnée aux reprises puisque sur les neufs morceaux, seuls deux sont des compositions originales, signées Greg Lamy et le reste, pour ainsi dire, a été puisé dans le répertoire jazz et pop. Pour bien souligner et apprécier les différences entre les styles des deux guitaristes, Greg Lamy s’approprie le canal de gauche tandis que celui de droite est trusté par Paulo Simoes.
L’entame du disque est portée par un groove lancinant et jovial de Marc Demuth qui arbitre les dialogues entre les deux six-cordes, l’une sans effets et l’autre voilée par une pédale wah-wah sur ce Mr. Stern de l’Australien Jim Kelly. Tour à tour, les deux principaux protagonistes s’échangent les rôles de solistes et d’accompagnateurs, écoutent leur partenaire et répondent aux notes qui fusent, voire reprennent à l’unisson ou en harmonies le thème principal. Ce mode opératoire sera réutilisé avec chaleur et élégance tout au long du disque. Ceci donne à l’entreprise un cachet de dialogues assez ouverts entre Lamy et Simoes, prolixes tous les deux, mais ne versant jamais dans la surenchère ni dans une virtuosité gratuite. Comme si les deux guitaristes étaient parfaitement conscients du fait que l’atmosphère à la coule doit être préservée coûte que coûte, laissant alors les égos aux vestiaires. Ce mode opératoire tout en subtilité constitue le fondement et la réussite principale du disque.
L’une des deux non-reprises Absturz suit en mode plus intimiste. Puis, destination le Brésil avec Beija flor de l’illustre Nelson Cavaquinho, considéré comme l’un des principaux auteur-compositeur de samba au XXe siècle. Mélancolie et déhanchements chaloupés se voient agrémentés de notes bleues éparses et lascives. Avec Dance for Victor de Philippe Catherine, le rythme s’accentue presque nerveusement et la fluidité des arrangements saute aux oreilles. Tout simplement, quant à lui, louche sur un mode jouette et bluesy vers une ballade avec quelques légères accélérations disharmoniques et surprenantes de la part de Paulo Simoes.
Ensuite, c’est au tour de Jim Hall, influent guitariste du cool de se faire tailler un costard avec Waltz new interprété avec beaucoup de retenue. Par contre, l’intro déstructurée All the things you are de Jérôme Kern laisse présager une suite à l’avenant. Pourtant rapidement, on revient dans les clous. Isn’t she lovely de Stevie Wonder est quant à lui traité avec beaucoup de légèreté et d’entrain. Pour finir, le standard Body and soul de Johnny Green entame une entorse au dogme du duo, car la contrebasse ne se contente plus d’accompagner du fond du terrain, mais participe pleinement aux débats.