C'est un éternel débat que le Statec souhaite trancher sereinement : l'indexation automatique des salaires alimente-t-elle par elle-même une autre indexation ? Pour résumer le phénomène « allégué » d'auto-allumage, on dira que la hausse des prix à la consommation fait augmenter les salaires via l'indexation automatique et que les entreprises répercutent cette hausse de leur coût salarial sur leurs prix de vente, ce qui entretient la spirale prix salaire.
Le service de statistiques épluche depuis le mois de mars l'indice des prix à la consommation national (IPCN) pour détecter la moindre relation de cause à effet. 165 postes ont montré une grande sensibilité à l'évolution de la tranche indiciaire, sur les quelques 7 000 que compte l'IPCN. De nombreux tests ont été effectués sur ces postes dont le plus pertinent est certainement celui dit de la «causalité ». Il s'agit de composantes de l'indice dont les prix varient de façon « proportionnelle » et « régulière » et qui réagissent juste après l'intervention d'une tranche indiciaire. Pour l'essentiel, ce sont des services, extensifs en mains d'uvre et rarement exportateurs (les coiffeurs, les services domestiques ou de réparation par exemple).
Les conclusions du Statec dans sa dernière Note de conjoncture (4/2001) sont claires : « environ 15 pour cent de la pondération totale de l'IPCN est susceptible d'engendrer de l'inflation supplémentaire suite à une hausse des salaires due à l'indexation ». « Pour ces biens et services, la transmission de la hausse des salaires est très rapide (un à cinq mois) et génère donc à court terme une poussée d'inflation supplémentaire. Les autres biens et services sont soit exportés ou importés ou ont une composante salariale trop faible. » Ce petit quinze pour cent - et c'est encore très large dit-on au Statec - ne peut donc pas à lui tout seul déclencher une nouvelle tranche indiciaire.
Les salaires et prestations sociales ont été automatiquement augmentés de 2,5 pour cent à trois reprises en l'espace de deux ans. Le Statec table d'ailleurs sur une nouvelle échéance de l'index au troisième trimestre 2002.
Il y a un an, la Banque centrale de Luxembourg avait pris part au débat sur les risques d'auto-allumage : « L'accélération de l'inflation est en partie due aux hausses du prix du pétrole depuis le premier trimestre 1999. Mais il se pourrait également qu'un effet d'auto-allumage de l'inflation existe au Luxembourg, du fait de l'indexation automatique des salaires sur l'indice des prix à la consommation » lisait-on dans le rapport annuel 2000.
La théorie de l'auto-allumage est donc tombée. Pour preuve l'évolution des prix du coiffeur entre le premier trimestre 1996 et le premier trimestre 2001 qui ne serait pas imputable à l'indexation automatique des salaires. Les tarifs des mises en pli et autres prestations capillaires ont augmenté de dix pour cent dans cet intervalle au Luxembourg, de 14 pour cent en moyenne dans les pays de l'Union européenne (dont la plupart ignorent l'index) et de douze pour cent dans la zone euro.
On en saura d'ailleurs bien plus au mois de mai ou de juin. Le Statec s'apprête en effet à sortir à cette date la version finalisée de son étude sur l'auto-allumage. Au stade actuel, l'étude n'a pas encore pu dire si à long terme, l'index crée ou non de l'inflation supplémentaire.