Pour s’en prendre plein les mirettes parce que les diamants sont les meilleurs amis des filles selon Marylin Monroe, on passera son chemin. La collection de bijoux idéale de Diane Venet qui fait halte au Ratskeller du Cercle Cité à Luxembourg, après un itinéraire qui l’a menée de à New York, à Athènes, Valence et jusqu’à plus récemment à Paris, scintille de la créativité d’artistes.
Si donc ça ne brille pas comme dans la vitrine d’un bijoutier, les bagues, bracelets, broches et pendentifs exposés, sont toutes des pièces de joaillerie car leur fabrication nécessite les connaissances ad hoc. En l’occurrence pour beaucoup, de Giancarlo Montebello, auquel Diane Venet dédie l’exposition. Ces bijoux-ci sont des exemplaires uniques ou réalisés en toutes petites séries limitées comme la bague Believer du duo d’artistes luxembourgeois Martine Feipel et Jean Bechameil. Ils peuvent aussi (rarement) inclure une pierre précieuse tel Medusa, un escargot marin avec un œil en améthyste monté sur or de Rebecca Horn ou être immédiatement reconnaissable du style de l’artiste : Compression, miniature sur un lacet en cuir, est de César bien sûr.
Le fantastique bracelet, piqué de demi-sphères aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur du cercle martelé de Lucio Fontana a été offert par son mari, le sculpteur Bernar Venet à sa femme Diane. Il est, avec son alliance, enroulée autour du doigt de la mariée comme une de ses sculptures liane d’acier surdimensionnée, le point de départ de la collection qui voyage de par le monde comme un musée de poche et une histoire de l’art des vingtième et 21e siècle, dit-elle, pour le partage de la connaissance et le plaisir.
Les Bijoux d’Artistes, la collection idéale de Diane Venet, c’est tout d’abord s’émerveiller, partant par ordre chronologique des années 1950, devant les créations de Hans Arp, Fernand Léger, Picasso, Man Ray… Parmi ces classiques, la montre petite cuillère surréaliste de Salvador Dali, une broche, dotée pour la coquetterie d’un peigne sur le manche, remporte la palme du cocasse, la croix inversée de Man Ray, avec un torse de femme suggéré sur les bras latéraux Optic Topic, celle de l’irrévérence. Beaucoup des pièces exposées jouent d’ailleurs du rapport forme-intitulé. Comme, toujours de Man Ray, les boucles d’oreille en forme de feuille enroulée Pendentif-Pendant, qui ont d’abord été portées par l’actrice Catherine Deneuve.
Si au fil du temps, Diane Venet en a acquis comme celles-ci, beaucoup de bijoux ont été créées pour elle, souvent après de longues tractations, parce que créer une œuvre de petite dimension, ce n’est pas la même chose que peindre en grand format ou réaliser une sculpture géante pour l’espace public. Elle a néanmoins réussi à convaincre Frank Stella, dont on pourra ensuite aller voir l’œuvre dans la cour de l’Institut Max Planck au Kirchberg pour se rendre compte de l’hésitation que peut avoir un artiste à passer à la miniature. Les bagues, ce qu’on voit bien sur la vidéo projetée dans l’exposition, sont d’ailleurs souvent surdimensionnées pour un bijou : ainsi, toujours de Lucio Fontana, le sublime ovale rouge.
Diane Venet elle-même fait remarquer qu’il y a plus de créateurs hommes que femmes dans sa collection. Il n’empêche, c’est tout Louise Bourgeois qui est à l’œuvre dans Barre de métal, un collier de chien avec une chaîne-laisse, qu’on la voit porter dans la même vidéo lors d’un déjeuner avec son père, et d’Orlan, on verra une broche autoportrait. C’est que tous les artistes, quelle que soit l’échelle à laquelle ils travaillent, ne dévient pas de leur ligne conceptuelle et les bijoux exposés ici sont une partie intégrante de leur œuvre. Il est donc impossible de ne pas reconnaître la facture d’Arman, Georges Braque ou Pol Bury, Giacometti ou encore Julio Le Parc, Anish Kapour.
Alors qu’un bijou est par essence intime et donc égoïste, (on craque pour le grand collier jaune de Claude Viallat), la palme de l’intelligence et de l’intérêt pour les autres, revient à Lawrence Weiner. Human Rights Abonment est une série de plaquettes suspendues à une chaîne comme autant d’identités anonymes. Diane Venet, expose à part ces créations qui sont parmi ses favorites, que Nathalie Jacoby a disposées sous des cloches de verre comme des icônes. On ne peut d’ailleurs pas visiter l’exposition sans voir l’écrin autour de l’exposition : les caissons suspendus, les vitrines, les estrades créées par NJoy architecture inside, sont à la fois simplissimes de par les matériaux et un bijou supplémentaire de par les formes mises en œuvre. Un idéal qui, on l’espère, satisfait Diane Venet pour le passage de sa collection à Luxembourg.