Malgré une moyenne d’âge inférieure à 25 ans, The Disliked est déjà une formation chevronnée qui compte, atout non négligeable, une cohorte de fans qui apprécie se faire galvaniser par leurs prestations scéniques dotées d’une patate d’enfer. Il faut dire que le genre musical pratiqué les condamne aussi à suivre ce canevas. En effet, le ska punk, genre qui jouit encore d’une popularité conséquente un peu partout, n’est pas réputé pour ses moments d’introspection et de spleen existentialiste. Pourtant, The Disliked est le dernier défenseur local d’envergure après la mise au placard de Kunn [&] the Magic Muffins. C’est donc avec une deuxième plaque sur Ashcan Records, label local presque exclusivement consacré au ska punk et ses dérivés, intitulé My parents went to Eldorado and all I got was this lousy Cadillac, que The Disliked revient.
Dès le morceau d’introduction, My Profile qui égratigne au passage les sites genre Facebook, mené au tombeau ouvert, le sextet définit les limites de ce qu’est son aire de jeu. Un ska sautillant, ponctué par des cuivres enjoués et ensoleillés, s’empoigne avec des refrains morveux et fédérateurs hérités du punk et de ses guitares hérissées. On ne fait pas dans la dentelle et l’efficacité prime avant tout ! À ce petit jeu, il faut leur reconnaître un certain savoir-faire, ils ont bien retenu la leçon de leurs maîtres. Les textes sont souvent de petites saynètes qui, comme beaucoup de groupes du genre, se veulent soit ironiques en épinglant l’un ou l’autre travers du modèle sociétal de consommation forcené (From Monday to Sunday, Subclinical Neuroses, Miss Vip) ou revendicateurs d’une certaine liberté de pensée (Original, I could not pretend), prônant la tolérance (Lucky #8) et la bonne humeur. L’un ou l’autre titre ne peut s’empêcher d’avoir un contenu plus sentimental (Silly love story, Mary).
Musicalement, qu’est-ce qui distingue The Disliked de la cohorte de groupes encore en activité ? À première vue, pas grand-chose, tant les formations de ska punk appliquent souvent les mêmes recettes, avec plus ou moins de réussite. Le côté festif, énergique et incisif, valeur étalon du genre qui nous préoccupe, gomme cette apparente lacune et The Disliked n’a rien à envier à beaucoup de groupes de ce tonneau. Mais en y regardant de plus près, et mis à part le timbre particulier du chanteur, le sextet varie son jeu en se lançant là dans une polka endiablée ou en apportant certaines touches plus swing à l’une ou l’autre compo, ce qui bien sûr aère le propos de manière bienvenue. Sans oublier, sur Why do I cry, ce grand moment parodique où un piano incongru déboule au milieu du morceau, clin d’oeil aux flonflons pathétiques chers à Axl Rose période November Rain, souligné ensuite une guitare exagérément épique ?
My parents went to Eldorado and all I got was this lousy Cadillac nous montre un groupe qui aime s’amuser sans trop se prendre le chignon, mais qui ne rechigne pas trop à la tâche quand il s’agit de mouiller sa chemise. Communicatif, l’entrain présent sur ce disque n’est cependant en rien comparable avec l’engouement scénique, où le groupe parvient réellement à ses fins, c’est-à-dire amuser son audience sur toute la longueur.