Gast Waltzing fait figure de haute autorité en matière de jazz au Grand-Duché. Fondateur notamment de l’ONJL (Orchestre national de jazz Luxembourg), son talent n’est évidemment plus à discuter, mais les choses se compliquent lorsqu’on prend le temps d’étudier la discographie de l’orchestre. Pour rappel, les deux derniers disques publiés par la troupe, D’Pierle vum Da et ONJL featuring Jean-Jacques Mailliet, tous deux au packaging amateur, étaient inégaux. Le premier était sympathiquement has-been. Le second, s’est toutefois avéré être un coup d’essai non réitéré mais qui d’une part, était plus que correctement mixé et qui d’autre part contient encore un formidable morceau. En effet, l’introduction Floating over Antarctica est un superbe titre qui mérite le coup d’oreille.
Le rappel étant fait, l’orchestre vient de publier un nouveau disque placé sous le signe de l’espoir et appelé, à juste titre, Hope. Même si ce n’est qu’anecdotique, le design de la pochette ne fait pas défaut à la règle des albums parus chez WPR (WaltzingParke Records). C’est amateur, les illustrations de Sabrina Kaufmann sont désuètes, mais admettons. L’opus se compose de onze pièces pour cinquante minutes de musique. Six titres instrumentaux pour cinq chansons signées Maggie Parke et performées par Salima.
L’introduction She laisse sceptique mais pique la curiosité. Une batterie qui implose, des cuivres en cœur, une voix soul, de la musique de big band. On comprend le « clin d’œil à l’ère des Big Bands accompagnant des divas » évoqué dans la brochure presse du projet. Un assez long solo à la guitare électrique accompagné de timides skats s’enclenche ensuite. Suit No dialogue, un long titre classique mais une fois n’est pas coutume, efficace. Une structure sans surprises mais jazz à souhait, et qui offre une certaine liberté aux musiciens. Why is it est un véritable morceau de cabaret aux airs lointains d’un Randy Newman, mais qui fatigue.
Fake news, un des meilleurs titres du projet sans doute, est atypique. La première minute semble tout droit sortie d’un catalogue KPM, le charme du rétro en moins. KPM (pour Keith-Prowse-Maurice) c’est un ancien label de musique d’illustration où ont notamment fait leurs classes Syd Dale, Neil Richardson, Keith Mansfield ou Alan Hawkshaw, pour ne citer que ceux-là. Riche de milliers de titres, les catalogues du label sont une véritable mine d’or pour les amateurs du genre. Steven Soderbergh ou Michel Hazanavicius ont notamment puisé dedans pour illustrer leurs films. La trompette vient détruire cette délicate impression, mais la douceur du cuivre compense.
S’ensuit Hard to love, le plus long morceau qui ne décolle jamais, mais qui garde un certain charme du fait de ses nappes détendues et de la voix maitrisée mais trop posée de Salima. À l’écoute du morceau suivant, Traffic Jam & Re:Jam, on en ressort lessivé, rincé ou toute autre expression du même acabit. Le rythme est endiablé certes, mais la sauce ne prend pas. Les cuivres sont criards et les riffs faussement enjoués. Sur I think that it’s time, Gast Waltzing démontre son talent pour composer des leitmotivs entêtants. B Trumped est un énième titre de big band aux accents funk et Just another fool, un terrain d’expérimentation pour Salima, qui propose enfin de nouvelles variations.
L’album Hope est clôturé par Hope is forever et NU Hope, qui se répondent, mais qui ne marquent pas tellement. Pas indispensable, ce nouveau projet de Gast Waltzing et de l’ONJL a toutefois et sans doute beaucoup à gagner à être joué en live. Kévin Kroczek