Pascal Asselin, alias Millimetrik, compose de la musique électronique depuis l’aube des années 2000. Architecte d’une carrière protéiforme et basée sur des fondations solides, le Québécois à publié son dernier projet chez Kito Kat Records en février dernier, Fog Dreams. Sous-titré « une exploration de rythmes brumeux », ce projet comporte dix titres qui régaleront à n’en pas douter les amateurs de l’artiste, de musique house, ou même tous ceux qui dans une manière générale sont sensibles aux ambiances, ou plutôt aux élaborations d’atmosphères. Ici une atmosphère planante, onirique et donc brumeuse comme le souligne déjà le titre du projet.
L’introduction Rêves brumeux autour de Lana Del Rey cogne sec. Les percussions sont omniprésentes, d’ailleurs elles le seront tout au long du projet. Millimetrik est aussi le batteur d’un groupe de stoner rock, Les Indiens. Le second titre Port Ellen Bass s’écoute encore et encore, Maude Audet y chante qu’elle aimerait être un île, thème principal de l’album, mais nous y reviendrons. Oscillant entre des passages planants et chantants, le titre explose avec une énergie folle dans un trip dancefloor, grand public, ce son restera le meilleur titre du projet.
Peninsula Mist I lorgne du côté du trip hop. Les titres suivants sont symétriques, minimalistes pour certains dont Peut-être que je suis une île ou bien Le fantôme du phare de Sambro Island. On se surprend à bouger la tête frénétiquement et on écoute le disque en boucle, en voiture de préférence, ainsi les routes et les paysages urbains défilent, reflétant la rythmique de l’album. La musique de Millimetrik est la quintessence de la musique de voiture, pour faire référence à la Muzak, plus communément appelée la musique d’ascenseur.
On regrette cependant que toute l’énergie de l’artiste soit comme expédiée au début du projet, privilégiant la création d’une atmosphère onirique, mais en toute honnêteté quelque peu lassante sur la suite. Toutefois, ce projet a bien été construit autour de plusieurs objets précis. Une île, un phare, des rochers et de la brume, autant d’éléments mis en avant sur la pochette du disque. Cette obsession du thème de l’île est présente à tous les niveaux. Peninsula Mist I et II, Sambro Island, et évidemment le cinquième morceau en forme de réflexion existentielle, Peut-être que je suis une île. Ce ne sont pas d’îles paradisiaques au sable fin et aux eaux cristallines avoisinantes que rêve le compositeur, mais celles brumeuses, rocheuses, grises qui en répugnent plus d’un. Bâtissant une véritable ambiance, on pourrait presque parler d’album à thème, tant le projet semble homogène et suivant une ligne toute tracée. Sans prendre le risque de tergiverser ou de s’enfoncer dans une réflexion philosophique sur le pourquoi de l’île brumeuse, disons très simplement que le projet est cohérent. Millimetrik n’a en soit rien révolutionné, mais il a le mérite de proposer une couleur musicale propre à lui, de choisir un thème et de s’y cramponner jusqu’au bout.
À vrai dire, dans n’importe quel genre musical, il est très aisé d’interpréter un morceau, le message qu’il essaye d’envoyer. Chacun y trouvera une interprétation différente. Celles des rêves brumeux et des îles ne représentent que celle de l’auteur. Si on décide de s’y rattacher, de suivre les titres des morceaux comme on suivrait des indications lumineuses dans la brume, d’un phare donc, on se surprend alors à vivre une expérience musicale non pas dense, mais du moins intéressante. Libre au compositeur de se considérer comme étant une île ou pas, tant que la musique est bonne, peu importent les artifices.