Un chapeau ou une casquette éternellement vissé sur la tête, une barbe plus que naissante et un sourire affable, Manu Da Costa est de ceux qu’on a envie d’aborder et qu’on a l’impression de connaître depuis toujours. Lui, il connaît tout le monde, enfin tout le petit monde qui passe par l’Exit07 ou par le D:qliq, ceux qui aiment le foot et la pétanque et ne rechignent pas pour faire la fête. Mais avant d’en arriver là, il y a eu un parcours qu’il est impossible de qualifier de rectiligne tant il a accumulé les expériences variées.
Arrivé du Portugal à deux ans – autant dire né ici – Manu a toujours voulu se forger sa propre culture, essayer différentes voies pour ne rien regretter. Parce qu’il ne voulait pas « être ce qu’on avait décidé pour lui », il a quitté le lycée technique où il avait été orienté pour aller passer son bac à Metz avant d’entamer des études supérieures. Fasciné par le sud, Pagnol, les cigales et le soleil, c’est à Aix-en-Provence qu’il suit deux années d’études luso-brésiliennes, « histoire de comprendre d’où je viens », puis un master en études européennes, « avec de l’économie, de la politique et de la culture ». Après un séjour Erasmus de six mois en Finlande, qui a allié « le plaisir de découvrir une culture » à « la difficulté d’être accepté comme étranger », c’est comme volontaire à l’Expo internationale de Lisbonne en 1998 qu’il forgera sa première expérience professionnelle. Un savoir-faire qu’il valorisera encore à Hanovre pour l’Expo universelle de 2000, où il peut se frotter à l’organisation, la gestion d’événements, le travail d’équipe, l’importance de l’accueil…
Après ces années à l’étranger, Manu décide de revenir à Luxembourg et « comme tout le monde » met un pied dans le monde de la finance. Il y apprend la rigueur, le sens de l’organisation et de la hiérarchie. Mais son envie d’entreprendre reste insatisfaite et quand son frère José s’associe avec Pascal Zimmer pour créer le premier bar lounge du pays, il se lance aussi dans l’affaire. Ce sera le Trip Lounge qui a fait les beaux jours (ou plutôt les belles nuits) de la Celula de Bettembourg. Une période extrêmement difficile pour Manu qui enchaîne une soirée derrière le bar après sa journée dans la finance et qui ne connaissait le monde de la nuit qu’en tant que client. Lui qui avait connu les grandes heures du Yucatan et du Casa n’avait « jamais fait un cocktail, ni servi une bière ». Époque difficile donc, avec beaucoup de stress, pas d’expérience et peu de moyens. Mais Manu s’accroche, travaille toujours plus, apprend de jour en jour et se fait une bonne réputation.
C’est comme ça que Lucien Elsen lui proposera de reprendre l’ancien Subterrania et d’y lancer un nouveau projet. Il y a tout juste cinq ans (le 28 avril, précise-t-il) ouvrait donc le D:qliq qui ne ressemblait à rien d’autre de connu. « Avec Fred Baus, on voulait développer un bar où écouter de la musique actuelle, nouvelle, inviter des groupes en concert dans un cadre un peu arty, street, mais pas trop. » Si le lieu met un peu de temps à trouver son public, il est devenu incontournable non seulement pour ses concerts, mais aussi pour ses soirées spéciales (Blind test, quizz, poetry slam…) et son mélange de public. Quand, en 2007, l’Exit07 se cherche une équipe de bar, il est encore trop tôt pour se couper en deux, mais à l’ouverture du CarréRotondes en septembre 2008, Manu et Fred sont prêts pour répondre à l’appel d’offre et l’emportent. « Les deux lieux sont complémentaires, bénéficient de notre expérience, notre expertise et touchent les mêmes publics ». Ce que les clients comme les artistes apprécient, c’est le sens de l’accueil et le bouillonnement d’idées. Plus qu’un simple barman, Manu propose des petits plus – un verre de bienvenue aux artistes qui s’y produisent, les projections de la coupe du monde de foot avec commentaires en direct, de bonnes choses à grignoter… – et s’implique dans la vie du lieu, y compris lors des activités pour les enfants.
Désormais, c’est vers un nouveau défi que Manu tourne la tête. Il a remporté l’appel d’offres du Fonds d’urbanisation et d’aménagement du Kirchberg pour exploiter le kiosk de Polaris. Et c’est l’appel du sud qui s’y fera sentir. Il prévoit de la restauration le midi avec salades, fougasses, grillades et autres ratatouilles, de la pétanque avec olives et grillons et des soirées (notamment un bal musette pour le 14 juillet) : « Je veux qu’on s’y sente en vacances. » Les employés du Kirchberg, les familles en balade, les joggeurs du dimanche, fêtards et cultureux… tout le monde devrait vite trouver le chemin de ce lieu qui ouvrira aux beaux jours.