Elle a un nom qui fleure bon l’exotisme, un père égyptien et une maman d’origine russe. Yasmine Ismaële a quitté son Paris natal et baroudé pendant une décade avant de poser ses bagages à Luxembourg il y a trois mois, fashionista bardée d’optimisme, de bonne humeur et enceinte de quatre semaines. Elle était attendue au tournant, cette store manager – en tous cas, la marque qu’elle représente dorénavant. Enfin du Zadig [&] Voltaire à Luxembourg ! Enfin un peu de Paris à (em)porter, et sur place en plus ! Mais gare au sourire de la demoiselle, il est si contagieux qu’il pourrait faire de l’ombre à la marque elle-même et devenir la vraie raison de la future fidélité de sa clientèle.
« Je pense qu’on est la somme de ce qu’on a vécu dans la vie », énonce – avec le sourire naturellement, – cette jeune femme de 32 ans. « Mon parcours est tout à fait atypique, et il aurait pu faire peur à n’importe quelle autre enseigne, mais cette marque a un côté rock [&] roll qui me correspond bien, avec en même temps ce goût pour les belles matières et les belles choses qui m’a été inculqué depuis ma plus tendre enfance ». Autodidacte, elle s’est enrichie de quatre langues et d’une multitude d’expériences humaines au cours de voyages qui l’ont vu s’installer en Italie, aux États-Unis et même au Canada. « J’ai eu envie de m’expatrier, de découvrir le monde. Je suis partie seule, à chaque fois. Aujourd’hui, je me sens riche à milliards grâce à tout ça. » L’ouverture d’esprit ? Elle la prône depuis le berceau, forcément puisqu’elle est tombée dedans quand elle était petite. Issue d’un mariage de cultures à l’opposé l’une de l’autre, Yasmine Ismaële revendique les fusions d’idées et de coutumes comme autant de richesses supplémentaires.
C’est d’ailleurs ce qui lui plaît au Luxembourg, ce côté cosmopolite qu’elle ressent avec force et qui est pour elle une source d’énergie. Elle apprécie « la facilité d’intégration très belle», et aussi « un vrai sens du civisme que je ne constate plus à Paris. Aujourd’hui, je me sens bien ici, en sécurité. C’est la parfaite conjonction du lieu et du moment dans ma vie. J’étais un électron libre ces dix dernières années, j’ai maintenant envie de stabilité ». Et pour cause, deux bébés à faire grandir, un à venir, et un autre né au mois de novembre dernier et qui semble déjà marcher tout seul. « On a ouvert pendant un mois qui est commercialement mort et ça a tout de suite marché. La clientèle ici connaît très bien Zadig [&] Voltaire, elle guettait l’ouverture d’un magasin. Donc tout a été facile. J’ai été touchée par le côté jovial de personnes qui me remerciaient d’avoir ouvert. Un vrai lien commence à se créer, et ma grossesse aide les choses : je reçois plein de conseils, de bonnes adresses de la part de mes clientes, c’est touchant. »
Le Luxembourg, Yasmine le fréquentait en frontalière depuis que sa mère s’était installée à Metz. Peu d’a priori pour cette ennemie des clichés de toutes sortes, mais l’installation d’un Zadig [&] Voltaire au grand-duché lui semblait tout simplement couler de source. « C’est un carrefour européen, une place commerciale judicieuse avec beaucoup de transit et des avantages salariaux non négligeables. C’était tout simplement une évidence de s’y implanter ». Une annonce « internationale » plus loin, et Yasmine décroche le poste. Son charisme et sa spontanéité y sont certainement pour beaucoup, une véritable bouffée d’air frais pour la clientèle locale. « Je dirais qu’environ 60 pour cent de ma clientèle est luxembourgeoise. Je trouve qu’il existe ici un côté raffiné qui va de pair avec une certaine douceur de vivre. C’est un mélange rare, on trouve à la fois de très belles enseignes et de très belles tables à l’instar des grandes villes, mais en même temps tout le monde se connaît, façon village d’Astérix. Les gens restent accessibles. C’est assez unique. »
La vie de bohême a du bon, surtout quand on pose ses valises. Yasmine Ismaële semble avoir trouvé son bonheur dans le pré, un pré néanmoins ouvert sur l’international et bordé de fron-tières. Mais on ne change pas une nature, et notre baroudeuse d’applaudir la multitude de destinations possibles à partir de l’aéroport ou l’efficacité du TGV. « Je fais des sauts à Paris le dimanche. Je vais voir une expo, je prends un café avec des copines puis rentre chez moi à Itzig, tout ça dans la même journée ! ». Nous, on est d’accord… tant qu’elle nous revient.