Le Konschthaus beim Engel fait partie de cet îlot sacré (comme diraient les bruxellois) de la vieille ville de Luxembourg. Rénové dans le style moyen-âgeux à la fin des années 1970, les rues ont connu ces derniers mois une restauration de l’espace urbain. La Ville a revivifié le quartier à coups de dallage couleur crème. L’effet est que des hordes de touristes et les camionnettes de livraison ont déjà sali en un temps record cet espace immaculé. Nonobstant, on y trouve le Musée national et la galerie Nosbaum & Reding désormais agrandie. Enfin, le Ministère de la Culture, gérant des murs, tente le coup de renouveau du Konschthaus beim Engel, profitant de la dynamique nouvelle.
Le Konschthaus beim Engel a toujours été un endroit foutraque, aux pièces labyrinthiques, où seul Kevin Muhlen, nous semble avoir réussi à faire une exposition cohérente il y a de cela deux ans, avec des installations vidéo, et à lui insuffler un esprit contemporain. C’est en effet tout sauf un lieu d’accrochage genre white cube ! Le ministère de la Culture inaugure néanmoins Intro_ une année d’expositions avec cinq artistes dont le travail, majoritairement graphique, nécessite… un accrochage aux murs.
Cela fonctionne donc plus ou moins bien, il faut faire attention où on met les pieds, ne pas rater une marche, et puis, s’aventurer (en passant le long de niches occupées par du matériel de bar) dans la tripaille des étages inférieurs du bâtiment, ses caves voutées et son odeur, nécessairement, de pierres humides…
En introduction on verra donc encore jusqu’au 25 juin, un travail qui fait référence à deux héros du roman national : Mélusine et Sigefroid, traités ici, au travail à l’aiguille par Sophie Dewalque. La jeune femme (née en 1983, dans une famille de couturières) a de l’humour et l’esprit salace. Les amours de la nymphe et du chevalier hébergées sur les bords de l’Alzette en contre-bas, prennent sous ses doigts de brodeuse un aspect torride.
Beaucoup plus réservée, on passe ensuite aux animaux de Keong-A Song qui, comme dans les fables de La Fontaine, renvoie habilement à des situations et parallèles humains. Cela grince aussi, mais dans un délicat travail aquarellé. S’ensuit le monde freudien de Matthis Toussaint à l’encre de Chine et à la plume. Malheureusement ensuite, l’exposition commence à refléter l’impossible lecture de l’espace du Konschthaus beim Engel. Du côté primesautier et impertinent du rez-de-chaussée, on passe aux caricatures de Pit Wagner sur l’affaire Bommeleeër, puis sans transition aux petites personnes de Sandra Biewers représentées en mièvres théières, sachant que les petites pastilles rouges attestent du fait que cela plaît au public. L’exposition se termine par les dessins un peu trash de Marion Dengler (laquelle retirera certainement les bienfaits d’un séjour prochain berlinois) et l’art gothico-1900 de Julie Wagener, jeune illustratrice qui, avec rigueur et cohérence – elle n’a que 27 ans – devrait faire ses preuves. Mais attention au mélange des genres…
Les artistes ont été choisis sous la houlette du ministère de la Culture, par un comité constitué de spécialistes de toutes les disciplines qui seront exposées, issus des institutions culturelles nationales, qui seront présents au cours de l’année à venir. La prochaine exposition sera consacrée à la céramique et à l’art du verre. On peut encore répondre à l’appel à projets pour les cinq dernières sessions.