Le gouvernement a finalement donné son feu vert à la publication, la semaine dernière, du rapport du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) du Conseil de l’Europe. Cela faisait exactement un an et demi que la délégation du CPT était passée au grand-duché.
En annexe, le gouvernement réagit à une série de recommandations et d’observations émises par le CPT, notamment sur l’évolution des conditions de détention dans les centres pénitentiaires du Luxembourg. La situation à Schrassig demeure toujours intenable à cause du surpeuplement chronique dont souffre la prison, c’est bien connu. Parfois, les détenus sont obligés de dormir par terre, sur des matelas, faute de lits disponibles. Pour remédier à cette situation, le gouvernement envisage maintenant d’y mettre en place « dans un délai rapproché, un bâtiment provisoire supplémentaire pouvant abriter dans des conditions décentes une centaine de détenus, en attendant la construction du futur CPU », le Centre pénitentiaire « Uerschterhaff » à Sanem pour les personnes en détention préventive. Cependant, celui-ci ne sera opérationnel qu’en 2017 au plus tôt. Le centre de rétention pour demandeurs d’asile déboutés devrait quant à lui ouvrir ses portes en début 2011.
Les conditions de travail du personnel d’encadrement resteront pénibles tant que la situation n’aura pas évolué. Néanmoins, le CPT rappelle qu’il faudrait lui rafraîchir plus souvent la mémoire et « faire savoir à leurs collaborateurs que toute forme de mauvais traitements, y compris les insultes, est inacceptable et sera sanctionnée ». Dans sa réaction, le gouvernement précise que le règlement grand-ducal de 1989 sur l’administration et le régime interne des établissements pénitentiaires « est remis en copie à chaque membre du personnel dès son entrée en service ou en stage ». Le CPT recommande aussi d’organiser des formations continues, surtout pour les agents pénitentiaires qui n’ont bénéficié d’aucune formation initiale. Le gouvernement promet des cours dès le mois de mars 2011 et voudrait « les orienter plus vers les besoins spécifiques en matière pénitentiaire (psychologie, droit, règles pénitentiaires européennes etc.) et faire dépendre les avancements à des postes de responsabilité à la participation avec succès à des cours de formation continue. » On pourra donc s’attendre à des réactions de la part des représentants du personnel surveillant.
Ensuite, le CPT plaide pour plus d’intimité lors des visites au parloir. Il invite même les autorités « à entamer une réflexion sur la possibilité d’octroyer des visites intimes hors surveillance ». Le gouvernement promet de faire des efforts dans le cadre des discussions sur la grande réforme pénitentiaire annoncée par le ministre de la Justice, « il est notamment proposé d’introduire au système pénitentiaire le concept de ’visites non surveillées’ ». Une petite révolution.
Reste la question qui fâche : la situation des mineurs en prison. Pour éviter que certains d’entre eux ne se retrouvent enfermés à Schrassig, après l’ouverture de l’unité de sécurité à Dreiborn, le ministre compte « inscrire formellement dans la nouvelle loi pénitentiaire qu’aucun mineur ne peut être admis aux établissements pénitentiaires ». La seule exception tolérée concerne les jeunes d’au moins seize ans qui ont commis des actes tellement graves qu’ils peuvent être jugés comme les adultes.
Le groupe d’évaluation du CPT s’était aussi rendu dans les commissariats de la police, qui, comme l’assure le gouvernement « veille constamment, à travers la formation professionnelle et un contrôle hiérarchique rigoureux, à ce que son personnel fasse preuve de droiture et s’abstienne de tout abus et excès de pouvoir ». Le droit de se faire assister par un avocat dès le début d’une arrestation, le droit à des consultations médicales sans la présence de gardiens et l’équipement d’un matelas dans les cellules de dégrisement sont d’autres points soulevés par le CPT. Or, pour ce dernier sujet, « les autorités consultées considèrent une telle mesure comme inadaptée pour des raisons d’hygiène ». Des couvertures sont plus facilement lavables, précise-t-on du côté de la police. Car même si les cellules disposent de toilettes à la turque, les candidats ne sont pas toujours dans l’état de les atteindre à temps. Cela fait aussi partie des réalités quotidiennes pas très enviables du métier de policier.