Une des pierres préférées de Romy Collé est la Tourmaline. Celle-ci peut se présenter en de nombreuses teintes, comme celle des yeux couleur vert eau de l’artisane bijoutière. Romy Collé taille la pierre et la fait poser dans des bagues qu’elle façonne en or, argent ou or blanc, dans des boucles d’oreille ou des pendentifs ; des pièces exhalant simplicité et pureté ; parfois de sophistiquées pièces maîtresses. Elle aime faire des commandes personnalisées, voire des transformations de bijoux anciens.
Son matériau brut, Romy va le chercher à Idar-Oberstein en Rhénanie-Palatinat, mecca de la pierre précieuse où se trouvent aussi nombre de ses partenaires sertisseurs. Son choix porte fréquemment sur des pierres venant de Tanzanie, du Brésil. Le marché des pierres russes ne s’est guère remis des conséquences de la guerre en Ukraine, dit-elle. Côté diamants, la demande a ralenti un peu, les prix ayant augmenté de plus de quarante pour cent depuis la pandémie… tendance croissante. Entre les voyages mensuels à Idar-Oberstein, elle travaille les bijoux dans son atelier à Lamadeleine, où elle reçoit, depuis 2016, ses clients sur rendez-vous.
Enfant déjà, elle était fascinée par la beauté scintillante des pierres, au point de faire, jeune, un stage à la taillerie luxembourgeoise de pierres précieuses de Bascharage, lieu emblématique aujourd’hui disparu. C’est ici que fut découvert son don de polir, tailler, placer les pierres. Elle enchaîne avec une formation à la Goldschmiedeschule dans la ville de l’or Pforzheim, parcours qu’elle clôt avec l’obtention d’un Gesellenbrief. Elle poursuit sa formation avec un cursus à la prestigieuse Meisterschule für Gold- und Silberschmiedehandwerk à Munich. Quelques années après, Meisterbrief en poche, elle se pose la question qui tourmente de nombreux étudiants ayant passé quelques-unes de leurs meilleures années à l’étranger : rester ou retrouver la patrie ? Désireuse de se rapprocher de sa famille, elle opte pour le retour au Grand-Duché malgré l’amour porté à la ville de Hambourg lors de sa formation chez la bijoutière Valérie Schwarzkopf (qui restera comme sa mentor et confidente). Romy entame un emploi dans une bijouterie en ville. Le passage sera bref ; son désir de se rendre indépendante l’emporte rapidement (surtout que le métier d’artisan bijoutier n’est pas représenté par un syndicat et les salaires peuvent se situer en-dessous du salaire minimum). Elle fait une pause quasi obligée en acceptant un emploi temporaire au sein des crèches de sa sœur, histoire d’accumuler le pécule nécessaire pour se rendre indépendante, mais aussi pour contracter un prêt bancaire pour la construction de la maison familiale (d’architecte). Aujourd’hui, avec deux enfants dont un bébé de neuf mois, elle avoue ne pas arriver à travailler à cent pour cent.
Qu’est-ce qui inspire Romy Collé ? La réponse saute aux yeux : ce sont les multiples manifestations de la nature, du règne animal comme floral. Ainsi, elle a une collection inspirée d’insectes – papillons, abeilles et autres coléoptères. Mais aussi de fleurs, de bois et de bambou, de gouttes. « Tout ce qui est filigrane m’attire ; c’est cet univers fragile, aérien et volatile qui est le mien ; je veux transmettre l’idée du caractère éphémère de toute beauté ». Dans son univers stylistique figurent des artistes telles que Anabela Chan, une des premières artisanes de haute gamme à travailler exclusivement avec des pierres cultivées en laboratoire et à utiliser de l’aluminium recyclé pour replacer l’argent. L’éthique, c’est un sujet qui préoccupe aussi Romy Collé : elle achète ses pierres chez les revendeurs de petite taille, et qui accompagnent leur produit d’un certificat d’origine (le but étant d’éviter les « blood diamonds » ou autres pierres trafiquées. Elle ne s’est pas (encore) lancée dans les pierres synthétiques, en dépit du prix moindre de ces dernières : « Il faut les mouler à l’aide de cire, procédé différent et non dépourvu de défis. En plus, la fabrication de pierres synthétiques est énergivore, et n’est vraiment durable que si on utilise de l’énergie verte ».
Parmi ses icônes de style, des créateurs tels que Elie Saab, Alexander McQueen, Van Cleef & Arpels ou encore Bee my love, toujours dans le registre entomologique. Si la majorité de ses clients sont des femmes, Romy aime façonner des bijoux pour tous les sexes. Pour créer des bijoux personnalisés, il lui importe de bien cerner les envies et le caractère de la personne, car elle vise à ce que son bijou soit porté. « Mes parures ne sont pas faits pour rester enfermées dans un tiroir… », d’où sa prédilection pour la légèreté.
En fin d’année, Romy Collé participera au processus de sélection pour Mains de maîtres, exposition à laquelle elle a participé à trois reprises. Le 1er octobre prochain, il y aura également une exposition de ses bijoux au domaine vinicole Claude Bentz.