La rentrée scolaire ayant sonné la fin des transhumances estivales, il ne reste qu’à préparer la prochaine escapade. Qui, publication du nouveau guide de Damien Wigny aidant, pourrait mener vos pas dans l’Est de la Toscane. Certes, ce n’est pas la porte à côté, mais voilà, c’est en Toscane que l’auteur, anciennement président – ô combien médiatisé – de la Kredietbank Luxembourg et de la Philharmonie, aujourd’hui à la retraite, coule des jours heureux. Et retraite ne devant pas forcément rimer avec inactivité, Damien Wigny emploie une partie de son temps à découvrir chaque moindre niche patrimoniale, puis à la disséquer et la classifier à l’instar d’un archéologue. Vous l’aurez compris, Damien Wigny ne poursuit nullement la politique de l’art pour tous. Il est érudit et prêche pour ses congénères érudits. Son dernier guide, le premier d’une série de cinq qui fait suite à Au cœur de Florence et Sienne et le Sud de la Toscane, est d’ailleurs préfacé par le directeur du musée des Offices. CQFD. Adeptes du Guide du Routard ou du Lonely Planet, passez votre chemin ; ce guide n’est pas fait pour vous. Ici, nul hébergement ou restaurant conseillé. De nourritures, il est certes question, mais elles sont « célestes ».
L’ouvrage, conséquent, se compose de trois parties : itinéraires, monuments et lectures. Cent vingt-neuf itinéraires au total. Pas moins de soixante sont proposés pour la seule ville d’Arezzo – 100 000 habitants et 386 kilomètres carrés. Parmi eux, les incontournables et les secondaires. Thématiques, ils ciblent une époque ou un artiste ou un type d’édifice. Visualisables grâce à des plans. Les monuments, présentés géographiquement et alphabétiquement sous forme de fiches et catégorisés, viennent compléter, moult détails à l’appui, la partie itinéraires. Des fiches judicieusement agrémentées d’encarts dans lesquels sont relatés d’autres faits concomitants, qu’ils soient d’ordre historique, religieux, artistique, philosophique, etc. Bémol, les informations pratiques font cruellement défaut. Aucun jour ni horaire d’ouverture. Autant cela se comprend pour certaines églises fermées hors offices, autant cela ne s’explique pas en ce qui concerne les musées. Et puis, la culture étant un processus sans fin, viennent les lectures. Non pas des recommandations de lecture, mais des textes « encyclopédiques » sur tel artiste (par exemple Fra Angelico) ou tel courant artistique ou philosophique ou religieux (le futurisme, la contre-réforme) ou telle technique (la marqueterie) ou tel fait historique (les guerres d’Italie) cité dans l’ouvrage.
S’il est un guide complet – ou presque –, s’il est un guide pour voyageurs non pressés, esthètes amoureux d’histoire et de patrimoine, c’est celui-ci. Pour autant que vous appréciiez les points de vue tranchés, parfois dispensables, de l’auteur. Richement agrémenté d’illustrations, rares pour certaines, il ne vogue pas dans l’immensité théorique. Mais l’ouvrage est volumineux et guère facilement emportable « sur la route ». L’écriture est petite, ses mille pages et les renvois incessants ne lui confèrent pas la maniabilité souhaitée. Peut-être est-ce après tout un guide de voyage virtuel. À posséder, à montrer négligemment à ses invités, à lire sans aller voir ou avoir vu et faire croire qu’on l’a lu.