La ministre de l’Égalité des chances, Françoise Hetto (CSV), recadre le phénomène de la violence domestique et tient compte des principales observations et recommandations formulées dans les évaluations de la loi de 2003 (d’Land du 4 septembre 2009) pour élaborer un nouveau projet. Le texte qu’elle vient de déposer au parlement prévoit plus de sévérité envers les auteurs de violence – hommes et femmes – et l’extension du champ d’action à toutes les personnes vivant dans une communauté domestique. Le sujet reste d’actualité. Mercredi, un homme a poignardé sa femme à Esch lors d’une querelle de ménage. Elle est décédée des suites de ses blessures.
Lors d’une intervention, les agents de police pourront emmener la personne violente de gré ou de force au poste et effectuer des fouilles corporelles si celle-ci rechigne à rendre les clés du logement duquel elle est expulsée. Les policiers auront aussi une nouvelle mission : le rappel à la loi, une sorte de sermon « qui mettra encore une fois l’accent sur la responsabilisation de la personne expulsée par rapport à ses actes de violence ». Le souci a été de forcer l’auteur des violences à prendre conscience de ses actes, car dans la majeure partie des cas, il se considère lui-même comme étant la victime qui a été expulsée de son domicile. Depuis 2003, 71 agresseurs ont été des récidivistes, deux d’entre eux ont même été expulsés cinq fois jusqu’en 2009.
Si la loi est votée, ils seront obligés de se présenter à un service de prise en charge des auteurs de violence comme le Riicht Eraus. Car l’année dernière, douze pour cent seulement des 302 personnes violentes ont été consulter ce service – sept pour cent ont agi suite à une recommandation formulée par les Parquets, 32 pour cent ont été « motivées » par les juges qui ont lié le sursis probatoire de leur peine à la consultation du service. Même si le cœur n’y est pas, les personnes expulsées seront forcées d’aller à Canossa. Si elles ne se présentent pas, le service tentera de les contacter après quatorze jours et fournira un rapport au Parquet. Le gouvernement entend donc briser la spirale de la violence en provoquant une prise de conscience. Or, tout dépend de la motivation des individus et la volonté de changer leur comportement violent.
Au fil des années, les mises à l’écart n’ont fait qu’augmenter. En 2004, la police est intervenue 253 fois pour 154 expulsions. En 2009, 302 personnes ont dû quitter la maison après 572 interventions policières. 450 enfants vivaient sous le même toit au moment de l’expulsion. Pour prendre en compte la situation des enfants-victimes, une cellule spéciale avait été créée en 2005. Or, si l’enfant est reconnu en comme victime – ne serait-ce que parce qu’il a été témoin de scènes brutales et de crises familiales traumatisantes –, la ministre considère néanmoins que « la violence entre partenaires ne compromet pas nécessairement la capacité du père ou de la mère d’assumer sa responsabilité de parent et ne justifie pas une interdiction automatique de prendre contact avec ses enfants liée à la mesure d’expulsion ». Cette déclaration est en contradiction avec les affirmations des défenseurs des droits de l’enfant qui multiplient les appels aux parents pour qu’ils cessent de se servir de leurs enfants pour mener leur guerre. Pourtant, la ministre leur en fournit ici les instruments.
La durée d’expulsion sera augmentée de dix à quatorze jours, pour permettre à la victime d’effectuer les démarches nécessaires lorsqu’elle décide par exemple de se séparer de son conjoint et de chercher une nouvelle demeure ou si elle décide d’introduire une demande auprès de la justice pour augmenter la période d’éloignement à trois mois.
En plus de l’éloignement forcé du domicile, il sera interdit à l’auteur des violences de prendre contact avec la victime ou de s’en approcher à moins de cent mètres. Il s’agit d’éviter toute tentative d’influencer ou d’intimider la victime pendant le délai de réflexion de quatorze jours ou de trois mois.
L’ancienne ministre Marie-Josée Jacobs avait déjà tenté d’intégrer une interdiction de s’approcher (Bannmeile) dans la loi 2003, mais elle n’avait pas réussi à l’imposer. Aujourd’hui, Françoise Hetto retente le coup.