L’accès aux réseaux sans fil est devenu l’enjeu d’une âpre bataille entre des hôtels américains et leurs fournisseurs de services de connectivité d’une part et la FCC (Federal communications commission) de l’autre. L’agence fédérale a perdu patience et inflige désormais des pénalités conséquentes aux entreprises convaincues de vouloir jouer au plus fin. En cause, l’habitude prise par ces hôtels et leurs prestataires de bloquer les réseaux de type hotspot afin de contraindre les clients et participants de conventions à utiliser leurs propres services payants et hautement lucratifs.
Le conflit est en cours au moins depuis l’an dernier, quand la chaîne Marriott International avait écopé d’une amende de 600 000 dollars pour blocage illégal. Ces dernières semaines, M.C. Dean, un installateur qui propose des services de connectivité au Centre de conventions de Baltimore, a été frappé d’une amende de 718 000 dollars pour avoir délibérément empêché le fonctionnement de hotspots. À Austin, l’exploitant de 28 centres de conventions a dû payer 750 000 dollars pour les mêmes raisons l’an dernier. La chaîne Hilton a été condamnée à payer 25 000 dollars pour avoir « apparemment cherché à bloquer une enquête sur le blocage » de réseaux wifi. Cette dernière formulation montre à quel point la FCC et les milieux du tourisme en sont à un jeu du chat et de la souris sur cette question. La chaîne hôtelière a été invitée à collaborer et à cesser toute obstruction, sous peine de s’exposer à une amende bien plus salée.
Du point de vue de la FCC, la pratique du blocage des hotspots est illégale, les consommateurs ayant selon elle un droit sans ambages d’utiliser la technologie des hotspots. L’agence interdit d’ailleurs formellement la vente des jammers, les dispositifs qui bloquent les connexions cellulaires, les radars de la police, le GPS et le wifi.
Selon un professeur d’université spécialisé dans les domaines de l’hospitalité et du tourisme cité par le New York Times, les hôtels américains ont engrangé un chiffre d’affaires d’environ un demi-milliard de dollars en frais de connectivité facturés à leurs clients l’an dernier. On comprend qu’ils puissent être tentés d’éviter que ces revenus ne leur échappent. Ils reprochent à la FCC de ne pas avoir énoncé clairement les règles applicables sur la sécurisation des réseaux wifi et font valoir que les réseaux de type hotspot peuvent présenter des failles de sécurité d’une part et interférer avec leurs propres réseaux de l’autre. Argument que balaie Travis LeBlanc, de la FCC, assénant que « les consommateurs en ont marre de se faire traire par les hôtels et les centres de convention qui bloquent leur connexions wifi personnelles. Cette pratique perturbante doit cesser. Il est clairement illégal qu’une entreprise bloque de manière malveillante des connexions wifi approuvées par la FCC ».
Aux États-Unis, pour les organisateurs de conventions, la mise à disposition d’un réseau sans fil aux participants représente une lourde charge qu’ils vont chercher à réduire par tous les moyens. Un demi-million de dollars par exemple pour le Consumer Electronics Show, la grand-messe de l’électronique qui réunit quelque 175 000 personnes au mois de janvier à Las Vegas. Il n’y a dans ces cas aucune commune mesure entre les prix imposés aux organisateurs par les prestataires locaux et les frais encourus pour la mise en place de hotspots.
Aux États-Unis, et contrairement à la tendance lourde qui règne en Europe, on est loin de la « commodification » annoncée par certains des réseaux wifi, suivant laquelle on irait vers une généralisation de la connectivité wifi à titre gratuit ou à des prix dérisoires dans les lieux publics et d’hospitalité. Il faut en effet souvent payer quinze à vingt dollars par nuit pour avoir accès au wifi dans les hôtels américains, alors que ce type de tarification est de plus en plus rare de ce côté de l’Atlantique.