Depuis la vitrine sur rue Notre -Dame, on pourrait croire à des photographies. En particulier le triptyque Sea View 4 – Triptych, qui occupe le mur du fond de la galerie. Un arrêt sur image d’océan, scintillant à l’avant-plan comme éclairé par le soleil et au mouvement de va-et-vient de la marée dans la partie haute.
Cette pièce virtuose de Valentin van der Meulen résume en quelque sorte tout ce qu’il y a de technique et de talent dans la douzaine de pièces choisies par Julie Reuter dans la production la plus récente du peintre. Dans Image / objet – objet / image, le thème de la mer a en soi peu d’importance, sinon sa répétition, trois fois de suite, alors qu’il s’agit chaque fois d’une réalisation unique. On pourrait presque jouer au jeu des sept erreurs, parce qu’il y a des variations, bien sûr, infimes, comme dans toute réalisation faite main.
Valentin van der Meulen, désormais la quarantaine, a acquis la maturité d’expression pour oser un travail difficile. C’est un super technicien qui aboutit à une image en mettant en œuvre des couches et des couches de poudre de fusain de manière plus ou moins opaque. On le voit quand on laisse son regard s’absorber dans Sea View 4 – Triptych, l’épaisseur de la matière va croissante .
Le papier est l’autre matière importante de ces œuvres. On n’en devine pas l’épaisseur. Il est très fin collé sur une toile ensuite pliée sur la tranche du cadre en bois. Cela peut paraître curieux de parler ainsi de la fabrication des œuvres, avant même de ce qu’elles représentent ou dégagent comme impression. C’est peut-être pourquoi dans Image / objet – objet / image, Valentin van der Meulen a tenu à accrocher un triptyque de trois petits formats, des esquisses. On voit, à la marge, des dimensions, qui renvoient à la dimension maximale atteignable pour le rendu de la transparence d’un papier crépon de couleur et ce qu’il laissera apparaître par-dessous du travail au fusain.
Ces trois petits formats sont aussi l’occasion de montrer les thématiques abordées, qui sont, outre l’eau, le végétal et la chair humaine, ou plutôt, le rendu au fusain de la surface de ces trois matières. Van der Meulen a photographié une plante en extérieur pour la qualité de de la lumière naturelle sur ses feuilles. Quatre sont présentées dans l’exposition. Les variations Sans-titre – Végétation 6, 7, 8 et 9, ce sont quatre cadrages différents de la même plante. C’est un jeu entre la figuration et l’abstraction, puisque de la peinture pure, noire, zèbre l’image, soit par-dessus, soit en-dessous du travail aux pigments.
Si la représentation d’une plante peut être séduisante, celle-ci est de la famille des plantes grasses méditerranéennes. Elle a des feuilles en forme de piquants. Cela a quelque chose d’inquiétant, comme les œuvres qui sont consacrées au sourire et à la poignée de main, premier signe amical envers un interlocuteur. Vus en gros plan, ils ne le sont pas. C’est comme si Van der Meulen voulait dire ceci n’est pas la représentation de l’expression d’un geste, c’est une Image / objet – objet / image.
Fil rouge 11, 12, 13, 14, fait le lien entre la virtuosité de Van der Meulen à manier le fusain et la recherche, après l’occultation du papier par la couleur, la transparence du papier crépon, sur sa capacité d’absorption. Un goutte-à-goutte d’encre de couleur coule lentement jusqu’à épuisement de la poche d’encre et l’absorption plus ou moins importante par le papier buvard. On ne peut pas dire que la jeune galerie Reuter Bausch – un an en décembre – emprunte avec van der Meulen, la voie de la facilité.