L’affiche est alléchante. Elle réunit, grosso modo, les jeunes talents prometteurs – Christian Neuman, le réalisateur, designer et créateur de mode (voir ci-contre), les jeunes acteurs Anouk Wagener (découverte dans Perl oder Pica de Pol Cruchten) et Steven « Gilli » Milligan, silhouette véritablement tatiesque, qu’on a pu voir une première fois dans le mythique Plotspoiler de Jeff Desom – ainsi que de grandes figures de la scène culturelle autochtone comme l’actrice et chanteuse Sascha Ley ou le compositeur Claude Lenners pour la musique originale. Néanmoins, Time for new heroes, le nouveau court-métrage de Chris Neuman (produit par Re:media), qui vient d’être présenté, déçoit.
Esthétiquement plutôt réussi – le chef-op Alex Aach a tourné de magnifiques travellings et des gros plans étonnants sur les visages des protagonistes, la musique de Claude Lenners, quelques notes de piano et la voix éthérée de Sascha Ley, est entêtante –, c’est l’histoire en soi qui est un peu trop facile et devient lourde.
Catherine (Anouk Wagener), fille adolescente d’une famille ultra-bourgeoise extrêmement policée, doit faire le deuil de son père, sou-dainement décédé. Le film s’ouvre avec un très beau plan-séquence sur l’assemblée au cimetière, Catherine à l’écart, la caméra s’arrête sur elle et sur le visage tout flou de son ami Gregg (Steven Milligan), qu’elle ne cadre pas, parce qu’elle est fascinée par une femme asiatique (Jié Rossi-Fang), qui arrose les plantes sur la tombe d’un proche. Refusant les codes et convenances du deuil en milieu huppé que tentent de lui imposer ses proches, Catherine se réfugie dans le rêve, trimballant sans cesse un corbeau mort dans ses pérégrinations dans la ville et à travers champs. Cette métaphore du corbeau, symbolisant le père – il lui apparaîtra même déguisé en corbeau dans son rêve – est filée jusqu’à l’excès, on s’en lasse assez vite.
Les apparitions de Gregg sont alors de petites parenthèses ab-surdes et légères dans une ambiance morose : travaillant au parc d’attraction Walygator déguisé en éléphant en tutu rose (sic !), il est l’épaule sur laquelle elle peut se laisser aller dans sa tristesse. C’est lui aussi qui la suit pour la retenir de son stalking irrationnel de la femme asiatique, dont elle se croit amoureuse. Malgré ces quelques moments de grâce, Time for new heroes souffre de la faiblesse de son script, du symbolisme trop appuyé de certaines idées et des dialogues futiles.
Le film, tourné en anglais, devrait être programmé dans le cadre du Lëtzebuerger Filmpräis, qui aura lieu en automne.