Il s’est fait avoir. Lamentablement. Et à plusieurs reprises. Dans un entretien avec Michel Onfray où il est beaucoup question de l’islam et de l’islamisme, dans ses relations avec un réalisateur néerlandais, Stefan Ruitenbeek, sur un tout autre terrain, des lits appelés à héberger le tournage d’un film « de contenu sexuel, de contenu montrant des actes sexuels, de contenu montrant des organes génitaux ». Voilà pour les stipulations du contrat tel qu’il a été en discussion lors de deux procès, en France et aux Pays-Bas.
Ajoutez à cela les accusations de plagiat concernant son roman Soumission, soulevées par un Franco-Sénégalais qui avait fait parvenir à Gallimard et à Flammarion, dès 2013, un manuscrit évoquant l’élection d’un musulman à l’Elysée, ça en fait beaucoup à assumer dans quelques mois de la vie d’un écrivain. Mais soyons juste, le verdict de la cour d’appel sur le plagiat, demandant un réexamen de l’affaire, date du mois de mai dernier. Alors que le livre, Quelques mois dans ma vie, porte sur les mois d’octobre 2022 à mars 2023, daté de Paris, le 16 avril 2023.
Il reste donc l’entretien et l’aventure libertine, et les deux fois, Michel Houellebecq fait amende (peu) honorable. Il dit ne pas avoir relu le premier (pour un écrivain, de la négligence au moins), pour le contrat, c’est pire, il dit ne pas avoir dû saisir, comprendre, faute aux anxiolytiques et au vin. Ce que ne lui ont pas laissé passer les juges hollandais en appel, ayant trouvé « incompréhensible que Houellebecq ait participé aux enregistrements s’il trouvait le contrat vraiment problématique ». Le 28 mars, ils lui ont quand même accordé le droit avant sa diffusion de voir le film érotique, voire la possibilité de s’opposer à certaines images.
Un écrivain, moins honteux, se serait tiré d’affaire autrement. D’autant plus que Gérard Depardieu, avec Bernard-Henri Lévy, autre conseiller notable, lui avait assuré qu’à la fin, c’est toujours la littérature qui gagne. À condition toutefois qu’elle existe, et que son auteur ait la poigne nécessaire, ajoutons de l’assurance, de l’aplomb, de l’audace. Se confesser dans toute la vérité de la nature, le lecteur saura situer les mots, ou alors, à l’opposé, s’abîmer dans la turpitude. Là encore, les exemples existent dans l’histoire littéraire. De fulgurants éclats de diamants noirs.
Michel Houellebecq, lui, a recours à la symbolique animale pour les contreparties, le fabliau reste faiblard. Il a l’injure lourde, au contraire, pour Picasso, traité de « crétin ithyphallique », déformant les choses et les êtres dans le sens de la laideur, rien que parce que son âme est laide. C’est court en matière d’esthétique, et à l’en croire, il suffirait pour s’en rendre compte, au sujet des femmes, d’une brève consultation de Google. Voilà où puiser pour Michel Houellebecq, son œuvre est de cet acabit, donc bien de notre temps, on préférera rouvrir le livre de Françoise Gilot, paru en 1964.
À un autre endroit de son livre, toujours au sujet des femmes, Michel Houellebecq s’en remet à Baudelaire, « un certain air de bêtise… ajoute à la beauté d’une femme », diminuant toutefois son attractivité érotique, allez comprendre. Recours à Baudelaire aussi de la part du lecteur pour sa conclusion qui aurait aimé voir (sans illusion toutefois) l’écrivain endosser, pour un fois, une tout autre impudence : Houellebecq héautontimorouménos. « Je suis de mon cœur le vampire,/ - Un de ces grands abandonnés/ Au rire éternel condamnés,/ Et qui ne peuvent plus sourire. » Houellebecq, bourreau de soi-même ? Nenni, fossoyeur au plus.