La carte SIM est-elle vouée à disparaître ? Plusieurs indices suggèrent une disparition au cours des années à venir, en tant qu’objet physique usuel, de cette puce embarquée dans les téléphones portables et son remplacement progressif par un module intégré dans les appareils mobiles lors de leur fabrication.
Les premières cartes SIM, de la taille d’une carte de crédit, ont été produites en Allemagne au début des années 1990 et se sont généralisées après l’adoption du format mini-SIM en 1996. Depuis, alors que cette carte s’est graduellement rétrécie (adoption du standard micro-SIM en 2003, puis nano-SIM en 2012), elle est devenue un objet connu de tous les consommateurs et symbolisant l’avènement de l’ère de latéléphonie mobile. La nano-SIM aura vraisemblablement été l’itération la plus petite de ce support, puisque l’industrie s’apprête à entendre sur un format dit « embedded » qui correspondrait, dès lors que les constructeurs l’adopteraient, à une sorte de dématérialisation de la fonctionnalité d’identification de l’abonné aujourd’hui assurée par la carte SIM.
Même si en réalité ce standard JEDEC, aussi parfois appelé « carte SIM électronique », prévoit la soudure d’une micro-puce à même les circuits du terminal, celle-ci deviendrait programmable par le biais de l’interface du téléphone et dispenserait les constructeurs d’inclure un connecteur et une fente dans leurs appareils. Samsung et Apple sont tous deux en discussion avec le consortium GSMA (qui fédère le secteur) sur l’adoption de telles cartes SIM électroniques. Le dispositif ne fait pas encore l’objet, cependant, d’un consensus en bonne et due forme : selon la patronne du GSMA, un tel consensus n’émergera pas avant l’an prochain. Pour le marché des mobiles, une telle évolution aura sans doute des conséquences considérables. Pour remplacer une chaîne de distribution qui s’est rodée depuis près d’une vingtaine d’années autour des cartes SIM et couvrant les constructeurs, les opérateurs, les points de vente et les utilisateurs, c’est une transformation d’envergure qui se prépare à la faveur de laquelle chaque intervenant tentera de tirer la couverture à soi.
L’avènement de ce nouveau dispositif est souhaité surtout par les constructeurs, qui espèrent ainsi ravir aux opérateurs une partie au moins de la relation privilégiée que ceux-ci parviennent à établir et à entretenir avec les consommateurs par le biais des abonnements. De fait, aujourd’hui, la vente d’un abonnement se traduit en pratique par la remise de cette puce embarquée, qui en vient à symboliser le lien du consommateur avec son opérateur.
Après le passage à une version électronique de la carte SIM, le jeu sera en effet beaucoup plus ouvert pour les constructeurs, qui pourront commercialiser leurs appareils de manière plus indépendante des opérateurs. Cité dans le magazine Wired, Steve Perlman, le promoteur d’un nouveau type de réseau sans fil en voie de déploiement dans la région de San Francisco, note que les spécifications du nouvel iPhone comprennent pratiquement tous les types de réseaux sans fil en utilisation dans le monde, pour s’en réjouir. « Si vous construisez un téléphone compatible avec tous les réseaux du monde, vous facilitez la vie de ceux qui veulent migrer d’un opérateur à l’autre ». Perlman rappelle par ailleurs qu’Apple a indiqué lors de sa récente présentation vouloir aussi à l’avenir proposer des plans de financement pour ses téléphones, ce qui revient à se mettre en concurrence directe avec les opérateurs et leurs forfaits sur ce marché.
Certes, Apple n’a pas annoncé la généralisation de sa version propriétaire d’une telle puce, l’Apple SIM, qui n’est pour l’instant déployée que sur ses tablettes. Il faudra sans doute que deux ou trois intervenants majeurs introduisent une technologie unifiée pour qu’elle parvienne à s’imposer et à bousculer le status quo. Mais l’évolution vers la carte SIM électronique semble inéluctable, et il y a fort à parier qu’elle sera bénéfique pour les consommateurs.