Une cinquantaine de jeunes gens sérieux se sont rassemblés ce samedi après-midi pour le congrès du CSJ à Grevenmacher. Une grande homogénéité règne dans la salle du centre culturel. Quasiment tous les participants portent le déguisement du politicien de droite : Blazer bleu marine sur chemise blanche, souvent assortis à un pantalon kaki. L’audience est largement masculine et, à une exception près, tous les intervenants sont des hommes. Par moments, on a l’impression d’assister à une représentation scolaire. Des résolutions bon-enfant sont présentées et approuvées sans discussion. « Merci pour votre présentation », dit le Premier ministre, arrivé sur le tard. Le public rassemble le gratin du CSV : cinq membres du gouvernement, le chef de fraction, le président de la Chambre, une demi-douzaine de parlementaires ainsi que deux eurodéputées ont fait le déplacement dans la « Muselmetropol ».
Léon Gloden, Marc Spautz, Alex Donnersbach, Claude Wiseler et Luc Frieden ne se sont pas contentés d’écouter, ils ont également fait des discours plus ou moins longs. Tous sont revenus sur le coup d’éclat entre Trump et Zelensky la veille, qui a profondément heurté l’opinion publique européenne, et particulièrement les sensibilités atlantistes du CSV (lire page 3). Or, le déphasage est énorme entre ce moment de bascule historique et les résolutions, plutôt plan-plan, préparées par le CSJ. La première thématise l’éducation financière, la deuxième la protection des acheteurs de Vefas. La troisième appelle à la valorisation de l’artisanat et fustige la « concurrence indirecte » qu’exerceraient les communes et l’État en offrant des « conditions de travail plus attractives ». Au lieu de créer des « emplois étatiques », la main publique ferait mieux d’externaliser « des travaux divers sur le terrain » à des entreprises privées, estime le CSJ.
Passé récemment du service com’ de la Chambre de commerce au service com’ du ministère des Finances, le président du CSJ Metty Steinmetz tient un discours cent pour cent aligné sur la politique gouvernementale. Luc Frieden se montre magnanime, lançant : « Also Metty, meng Telefonsnummer hues de ! A mir fannen ëmmer Zäit, déi Gespréicher ze féieren… » En deux heures et demie de congrès, pas un mot critique n’aura été prononcé à l’encontre de la politique gouvernementale. À une exception près, et elle vise le libéral Claude Meisch. Gabriel Jordanov, chef de CSJ Schüler a Studenten, se lance dans une diatribe passionnée contre l’alphabétisation en français (« dat Opgesplécks vun eisem Schoulsystem ») et un supposé nivellement vers le bas : « De Constat ass katastrophal ! D’Verbe gi net méi conjuguéiert ! », s’offusque le jeune étudiant.
L’organisation des jeunes a connu des périodes plus contestataires. En 1979, un jeune Jean-Claude Juncker présentait la CSJ comme « levain dans la pâte du CSV », et se démarquait ainsi des milieux cléricaux. En 1994, Laurent Zeimet et Pierre Lorang revendiquaient de la « frësch Loft » et critiquaient la « lähmende Selbstgefälligkeit » du CSV. En 2015, Fréd Ternes et Charel Hurt plaidaient pour le droit de vote des étrangers, et étaient violemment attaqués par certains notables de la Mammepartei. Or, le CSJ est devenu très sage. Installés dans la salle d’attente du pouvoir, les jeunes ne créent plus de remous. Ils ont été bien servis. Marc Spautz rappelle que les « CSJler » n’ont jamais été aussi nombreux au Krautmaart. Et avec Serge Wilmes et Elisabeth Margue, deux ex-présidents sont entrés au gouvernement. Ces carrières devraient constituer « un encouragement » pour les jeunes présents. (Le CSJ compterait 688 membres, a-t-on appris au congrès.)
Explicité ce samedi, le papier de position du CSJ sur les pensions prend, lui, quelques risques politiques. Il préconise « un système unitaire » privé et public (aux dépens des fonctionnaires), tout en concédant que cette question serait « e bessi heikel ». Les jeunes tentent le grand écart. D’un côté, ils proposent de faire payer les riches en relevant le plafond des cotisations (actuellement fixé à cinq fois le salaire minimum), sans nécessairement augmenter les prestations correspondantes. (Une position que défend également Déi Lénk.) De l’autre côté, ils veulent promouvoir les pensions par capitalisation, une « diversification » qui permettrait de renforcer la « Eigenverantwortung ».
Metty Steinmetz s’intéresse surtout à la politique européenne (il était candidat aux élections de 2024). Cela fait cinq ans qu’il court les réunions du Yepp (les Jeunes du Parti populaire européen) où il a tissé son réseau. Sur les douze derniers mois, lui et son secrétaire international, Mich Weber, ont participé à quatre réunions du Yepp, du globetrotting politique de La Haye à Rabat, en passant par Athènes et Turin. Dans la capitale piémontaise, ils étaient invités par Forza Italia Giovani contre lesquels le CSJ aurait vaillamment défendu les accords de Schengen.