Brauerei Stuff, c’est avant tout l’histoire d’une rencontre festive il y a deux ans, dans un festival de musique en Flandres... Joseph Hallack-Wolff y déteste la bière qui est servie et le fait savoir à qui veut l’entendre ; Antoine Biasino, qui traîne une oreille attentive, annonce au premier qu’il est tout à fait d’accord avec lui. Heureuse coïncidence, les deux jeunes hommes habitent le Grand-Duché, Joseph poursuit une formation de Maître Brasseur dans un institut professionnel d’Arlon alors qu’Antoine souhaite se reconvertir dans un métier-passion après huit longues années passées dans le secteur financier luxembourgeois... L’affaire est entendue, ces deux-là brasseront ensemble, un point c’est tout.
S’en suivent un stage chez un brasseur hollandais qui, en l’échange d’un peu d’aide pour une commande exceptionnelle, s’engage à transmettre au duo nouvellement formé les bases du brassage professionnel et les démarches administratives de base qui semblent poser un premier problème bien connu de certains créateurs de petites entreprises : « Il nous a fallu des semaines pour qu’on puisse savoir si l’on dépendant de la Chambre de commerce ou de la Chambre des métiers, les deux nous renvoyant systématiquement vers l’autre... », déclare Antoine, préposé à la gestion administrative et à la communication de la société – son partenaire étant le chimiste complémentaire, à présent diplômé.
En parallèle aux demandes d’autorisation et soumissions de dossiers divers, les deux brasseurs commencent à s’équiper courant 2015, investissant par la même occasion la cave familiale des Biasino à Steinsel, espace qu’ils mettent entièrement aux normes de production et d’hygiène afin d’obtenir au plus vite les précieux « laisser-commercer »... Tout est étudié au millimètre, pour le meilleur comme pour le pire : « Nous avions commandé les nouvelles cuves de 300 litres en prenant toutes les mesures et elles étaient censées passer les portes tout juste, mais l’humidité à fait gonfler les cadres, on a donc dû tout démonter pour pouvoir les installer ! ». Pour se faire la main, Antoine et Josef collaborent de manière ad hoc sur des projets et brassent des bières « éphémères » et locales au possible. Ainsi, un voisin leur offre de pourvoir récolter un grand plan de houblon sauvage qui pousse dans son jardin, au milieu de larges ronces de mûres... Quelques jours et égratignures plus tard, ce sont 280 litres de Wëll Steeslerin qui sortent des cuves et de la cave pour être servis à l’Oktoberfest organisée par l’UN Käerjeng, l’équipe de football de Bascharage.
Près d’un an plus tard, la Brauerei Stuff est prête à débarquer sur le marché luxembourgeois et international. Les deux brasseurs ont quatre produits à leur disposition pour convaincre les amateurs de bières artisanales : la Knight in white satin, un mélange de blanches belges et allemande et de blonde, la Grande Ducale, une « red ale » plus ambrée utilisant du houblon cultivé sur les mêmes terres que du sauvignon blanc, la Revolution IPA et la Black widow, une bière brune qui fait la fierté de Joseph tant il estime qu’il a réussi à l’équilibrer et à apprivoiser le goût de café brûlé typique de ce breuvage. La communication, confiée aux amis de l’agence Lola et particulièrement réussie, est également achevée : identités visuelles, étiquettes et site internet online, tout pourrait partir en livraison d’un jour à l’autre.
Mais un dernier bâton reste planté dans les roues de la jeune brasserie artisanale... En effet, les dossiers administratifs semblent traîner dans les couloirs des ministères, de manière à ce que certains arrêtés ministériels restent à être émis pour que Joseph et Antoine puissent enfin vendre leurs bières, malgré les autorisations déjà obtenues. Ce dernier confie : « Nous avons déjà plusieurs établissements intéressés à Luxembourg, qui ont été convaincus par notre démarche et par la qualité de nos bières, on espère donc vraiment pouvoir obtenir les pièces manquantes au plus vite pour que nous puissions enfin faire fructifier notre investissement et faire chaque jour ce que nous aimons ! ». Brauerei Stuff est peut-être avant tout une rencontre, mais c’est aujourd’hui un projet professionnel solide mené par deux partenaires enthousiastes et reconnaissants l’un envers l’autre, qui n’attendant qu’une chose : faire couler le houblon avec autant de vigueur que le sang qui coule dans leurs veines...