Invitée à représenter le Luxembourg à l’international, tantôt comme jeune entrepreneuse, tantôt comme créatrice montante de la Grande Région, Feyrouz Ashoura passe ses journées à coudre et découdre ce qui sera bientôt sa nouvelle collection, très inspirée des motifs organiques qu’elle observe chaque jour dans la nature qui l’entoure. Non contente d’avoir créé sa propre marque et de se donner tous les moyens possibles pour la pérenniser, la jeune styliste indépendante est également très active au sein de plusieurs plateforme collaboratives et s’est donnée comme mission de promouvoir au mieux le talent et le courage.
Son talent personnel, Feyrouz l’a sculpté au fil des années, tant grâce à son héritage multiculturel qu’aux décisions importantes qu’elle a prises tout au long de son parcours. Née au Grand-Duché d’une mère franco-luxembourgeoise et d’un père d’origine tribale algérienne, elle ne se prédestine pas du tout à un métier de mode lorsqu’elle étudie au lycée... Passionnée par la science, elle souhaite alors entreprendre des études dans le but de devenir ostéopathe. Mais un problème se pose rapidement car si elle aime la logique qui régit les éléments naturels, elle reste hermétique à toutes les théories abstraites : « Lorsque je demandais quelle était la logique derrière l’équation de Schrödinger, on me répondait d’apprendre par cœur et de ne pas me poser de questions... » C’est finalement le stand d’une école de mode parisienne lors d’un salon de l’étudiant qui va tuer la carrière de thérapeute dans l’œuf et conduire la jeune fille dans la capitale française pour étudier le design de mode.
Pendant ses trois années à ESMOD puis un passage par Dubai en tant qu’acheteuse, Feyrouz Ashoura va polir ses aptitudes et affiner ses goûts et son style si particulier. Férue de « récup », la styliste prône très tôt une approche circulaire de la création de vêtements et trouve dans les matériaux existants la base nécessaire de ses créations. Ainsi, des chutes de peaux de grande qualité fournies à l’époque de son cursus parisien par une grande maison de luxe se retrouvent encore aujourd’hui entre ses doigts et intègrent une robe ou encore une veste de sa nouvelle collection qui sera présentée pour la première fois le 30 septembre prochain dans le cadre de la Luxembourg Fashion Week en Belgique voisine.
Les pièces créées par la jeune styliste sont à l’image de son atelier du 1535°C à Differdange : un joyeux chaos maitrisé. Fortement inspirée par ce que la nature offre comme texture, comme formes et comme symétries, elle privilégie pour ses dernières réalisations des thématiques organiques, en passant notamment par la déconstruction. Un exemple parfait est une robe bustier réalisée à partir d’une peau colorée par l’artiste Frank Jons, puis découpée en centaines de feuilles de cuir ré-assemblées et recousues à la main, formant presque une armure naturelle : « Au final, c’est un défi que j’aime beaucoup de partir de rien, de ne pas former un vêtement à partir d’une matière mais de fabriquer cette matière même à partir d’autre chose ». Plutôt que fashion designer, Feyrouz préfère d’ailleurs le terme de fashion engineer, une association science-mode qui se fait de plus en plus remarquer sur la scène internationale.
En parallèle de l’élaboration de sa collection, la créatrice luxembourgeoise met aussi un point d’honneur à promouvoir les talents divers et la courage d’entreprendre. Elle a ainsi co-fondé Braveyouth, une plateforme de collaboration entre jeunes créatifs visant à faire bouger les limites du possible à Luxembourg par des synergies vertueuses : « nous avions envie d’amener ici un écosystème d’innovation et de travailler avec des gens aussi motivés que nous. Tout seul, il souvent difficile de faire face au marché, à la lourdeur de l’administration, aux vieux carcans éducatifs... Alors l’entre-aide est primordiale ! » Egalement très active auprès de l’Amcham – la chambre de commerce américaine au Grand-Duché – Feyrouz Ashoura s’est vue offrir la possibilité au printemps dernier de représenter le Luxembourg aux États-Unis dans le cadre du Young Innovative Transatlantic Leaders Initiative, programme instauré par le président Obama et visant à faire voyager des groupes de jeunes leaders du monde entier. Lors des quatre semaines passées à Washington, Detroit et San Francisco, l’énergique jeune femme a pu confronter son approche à d’autres entrepreneurs issus de secteurs d’activité multiples et travailler sur les notions de confiance en soi et de reconnaissance. C’est avec cette expérience exceptionnelle – et un recueil de citations de Henry Ford – que Feyrouz aborde à présent les nombreux défis qui l’attendent, à commencer par le défilé du 30 septembre...