Grecque, née en Allemagne, vivant à Luxembourg après être passée par le Danemark et l’Espagne… Anatoli Papadopoulou est on ne peut plus « multi-kulti ». Cette styliste de 26 ans connaît un parcours sans fautes depuis sa formation à l’école internationale Esmod de Munich jusqu’à la création de son entreprise il y a un an à Luxembourg. Entre temps, elle a travaillé chez une créatrice à Copenhague qui lui a montré les ficelles du métier, notamment pour les achats, les foires, le choix des tissus. Si c’est à Malaga qu’elle a commencé à entrevoir la possibilité de créer sa propre entreprise, c’est à Luxembourg que son projet s’est concrétisé. « C’est une ville spéciale, avec tellement de gens différents et d’influences diverses », se réjouit-elle.
Elle a mené une longue réflexion en amont, non seulement pour la création de ses pièces, mais aussi pour son logo, son site internet (www.anatoli.lu) et son nom. C’est tout naturellement que son prénom est devenu sa marque, même si elle a cherché d’autres voies : « C’est moi, ce sont mes créations, tout simplement ». Anatoli a aussi décidé de ne pas se lancer dans les vêtements, mais plutôt les accessoires. Broches, ceintures, pochettes pour téléphones portables, sacs, pinces, foulards, colliers… « Les accessoires sont à la mode l’équivalent des épices dans la nourriture, cela paraît superflu, mais c’est essentiel ».
Colorées, imprimées, jeunes… difficile de trouver un qualificatif général pour toutes ses pièces. La styliste insiste sur un point : « Ce sont toutes des pièces uniques, fabriquées à la main ». Si les formes sont parfois proches, les tissus varient et vice-versa. Elle mélange différents tissus, généralement des cotons, de la soie ou du coton mélangé, y ajoute des boutons, des flots, des pinces, des rubans voire de la passementerie. Et c’est naturellement de ses nombreux voyages que lui proviennent ces matières premières. Elle préfère rapporter de petites quantités de différents tissus que de longs métrages du même.
Inspirée tant par la nature que pas ses rencontres, par les voyages et par son parcours, elle met un point d’honneur a continuellement renouveler et réinventer ses accessoires. Elle refuse le diktat des collections par saison et produit tout au long de l’année. La plupart de ses créations sont multifonctionnelles : cette ceinture peut être portée comme une cravate, cette autre comme un foulard. L’écharpe « 4 en 1 » est certainement la plus emblématique de la collection : réversible, elle comprend aussi une poche qui lui permet de devenir un petit sac, idéal pour la plage. Chacun s’appropriera donc l’accessoire pour l’utiliser à sa manière.
Mais ce sont sans doute ses broches qui ont fait son début de réputation grâce à la belle vitrine à la boutique du Mudam. Des formes florales, des pliages savants, des petits détails rigolos (une coccinelle, un poisson ou un bouton…), des prix calculés au plus juste (18 à 35 euros pour ces broches) – le succès ne pouvait être qu’au rendez-vous. Anatoli ne se contente évidemment pas du prestige du musée et démarche les boutiques pour y être distribuée. Les incontournables Boo, Usina ou Bing sont évidemment ses distributeurs. « Je vais les voir régulièrement avec mes pièces ou alors ils me demandent spécifiquement plus de ceci ou de cela », explique-t-elle alors que son sac déborde avant d’aller chez l’un d’eux.
Puisque ses pièces sont uniques, il est quasiment impossible de les vendre en-ligne. Pour toucher un plus large marché, elle doit donc aller voir des magasins à l’étranger. « Cela prend beaucoup de temps que je ne veux pas perdre sur la création, mais c’est essentiel pour l’avenir ». On sous-estime généralement l’envers de la médaille pour un créateur : comptabilité, marketing, analyse des marchés… Anatoli prend cette partie-là aussi très à cœur, au point d’avoir reçu un prix « Coup de cœur » au concours CYEL (Creative Young Entrepreneur Luxembourg) 2009. Aussi, elle observe les prix des autres marques avant de fixer les siens : « Outre les incompressibles frais de matériaux, de TVA, de distribution, valoriser le temps et la création est assez difficile. Le public ne se rend pas forcément compte de ce qui est dans un prix, » détaille-t-elle en comparant un sac de marque internationale, signe extérieur de richesse, mais très distribué à une création, confidentielle, mais unique.