Autant l’annoncer d’emblée, Claude Schmit, pour son roman Emile – Un enfant des Lumières, s’est vu décerner, l’année dernière, le premier prix du Concours littéraire national, dédié en 2014 au roman historique. Pour rappel, le Concours littéraire national est organisé chaque année par le ministère de la Culture, lequel décide du genre à primer. Le Luxembourg étant un si petit pays, quelle idée de vouloir récompenser des genres si précis, au lieu de récompenser humblement les bons opus, qu’ils entrent dans essai, nouvelles, poésie, roman ou théâtre ?
Le premier prix pour Emile – Un enfant des Lumières cause quelque peu la stupéfaction, car, hormis le labeur (quasi 450 pages), où se cache la valeur littéraire attendue dudit ouvrage ? Du roman, il n’en a que quelques ingrédients formels : des personnages et une alternance de récit et de dialogues, mais ni la prose entraînante ni le divertissement. Quant à sa valeur historique, faute d’exactitude (Emile – Un enfant des Lumières tient du romanesque, du lyrisme), elle est toute relative.
L’ambition première d’Emile – Un enfant des Lumières était certainement d’entrer dans la catégorie essai philosophique, la philosophie étant le dada de l’auteur. Mais n’est ni philosophe, ni vulgarisateur, à l’instar de Richard David Precht, qui veut. De philosophie, il est pourtant certes question, et même beaucoup, dans Emile – Un enfant des Lumières, le roman de Claude Schmit tirant son titre d’Emile ou de l’Éducation de Jean-Jacques Rousseau. L’on peut même dire qu’Emile – Un enfant des Lumières est une sorte de bréviaire sur Jean-Jacques Rousseau. L’on y parle de sa vie privée, de La Nouvelle Héloïse, d’Emile ou de l’Éducation, du Contrat social, des Confessions, des Rêveries du promeneur solitaire, de ses contradictions, de la polémique que suscite son œuvre, de la censure dont il est victime, de Diderot, du siècle des Lumières, de la Révolution française.
Mais alors que l’on serait en mesure d’attendre de la part de Claude Schmit, enseignant de philosophie à la retraite reconverti en animateur d’une émission radiophonique de philosophie, une position tranchée sur Jean-Jacques Rousseau, le message véhiculé dans Emile – Un enfant des Lumières n’est ni pro ni anti-rousseauiste.
C’est à son personnage principal, Emile, que Claude Schmit laisse les « commandes » ; il mène l’action et assomme le lecteur de ses divagantes pensées, de ses errances et de ses perpétuels retournements de veste. Ledit Emile, recueilli par l’Assistance publique, est persuadé, au vu de leurs ressemblances physiques, d’être le fils de Rousseau. D’ardent admirateur et défenseur de sa cause, il, complexe freudien oblige, en arrive à le mépriser. Et Rousseau de passer à l’arrière-plan derrière Casanova, Mozart, Sade et un groupuscule d’anti-Lumières. Et le lecteur de suivre Emile année après année devenir faussaire, escroc, puis meurtrier, s’émanciper, vivre aux crochets d’autrui, se désavouer, faire sa vie sentimentale et sexuelle, … Quel ennui !