Depuis 2007, l’institut britannique Z/Yen publie deux fois par an, pour le compte de la City de Londres, un indice mesurant la compétitivité de 75 places financières dans le monde. Le dernier palmarès, paru le 12 mars, est un petit événement : Londres, leader incontesté dans les six éditions précédentes, est rattrapée par New-York. Les deux villes devancent toujours largement Hong-Kong et Singapour, mais l’écart se resserre. Luxembourg est dix-huitième, à égalité avec Jersey, et cède deux places par rapport à septembre 2009 (voir les encadrés). Paris n’est que vingtième.
Pour construire son Global Financial Centres Index, Z/Yen collecte des données sur 64 points différents, regroupés en cinq domaines :
- les ressources humaines (qualité et disponibilité de la main d’œuvre, flexibilité du marché du travail...) ;
- l’environnement des affaires (impôts, réglementation...) ;
- l’accès aux marchés (sécurité des transactions, variété des intervenants...) ;
- les infrastructures (desserte, coût et disponibilité des bureaux et des logements...) ;
- les déterminants globaux de la compétitivité (niveau des prix, qualité de la vie...).
Certaines informations sont issues d’études statistiques (par exemple le coût des bureaux), d’autres viennent d’un questionnaire d’appréciation soumis en ligne à près de 1 700 professionnels du secteur (dont 800 dans les banques et les assurances). Elles sont agrégées de manière à donner une note exprimée sur mille points. L’indice publié en mars montre que l’attractivité globale des centres financiers dans le monde s’améliore, puisque 71 villes sur 75 voient leur note augmenter.
Seuls quatre centres régressent.Londres en fait partie. Avec quinze points de moins, la capitale britannique reste leader mondial mais partage désormais la première place avec New-York qui ne gagne pourtant qu’un point.
Bien qu’ayant été, de l’avis général, moins touchée par la crise que New-York, la capitale britannique paie surtout la volonté du gouvernement de renforcer la réglementation des activités financières (notamment des hedge funds, alors que 76 pour cent de leurs actifs dans le monde sont domiciliés dans la City) et la fiscalité (taxe de 50 p.c. sur les bonus supérieurs à 27 500 euros, taux marginal d’impôt sur le revenu porté à 50 p.c.). « Il y a eu beaucoup de dégâts », a reconnu un officiel de la City, mais « ce n’est pas irréversible », appelant de ses vœux l’arrivée, en juin prochain, d’un nouveau gouvernement (conservateur), plus sensible aux revendications des professionnels de la finance. Mais selon les derniers sondages les élections sont loin d’être jouées d’avance.
Shenzhen est la ville qui perd le plus de points (25) mais conserve la neuvième place mondiale à égalité avec Sydney. Les autres perdants sont Guernesey, qui sort du Top 20 et Dublin qui perd neuf places et se retrouve à la 31e.
Deux surprises supplémentaires apparaissent dans le premier palmarès 2010. D’abord la bonne tenue, malgré la crise, des centres financiers américains. À part New-York, on en trouve en effet quatre dans le Top 20, et ils progressent tous en termes de rang. Chicago gagne deux places en six mois et figure désormais à une étonnante sixième place. Boston est quatorzième (+ 3 places), San Francisco quinzième (+ 2) et Washington dix-septième (+ 3). Les centres canadiens se placent également bien : Toronto est douzième (+ 1), Vancouver est 23e (+ 6) et Montréal 26e (+ 6).
Ensuite la résistance des places suisses, malgré l’« annus horribilis » qu’a vécu la Confédération en 2009. Zürich pointe à la septième place et Genève à la huitème. Selon une étude publiée par Ernst [&] Young en décembre 2009, plusieurs hedge funds auraient déjà quitté Londres pour la Suisse et de nombreux autres seraient disposés à le faire si les pressions sur la City s’accentuaient dans les mois à venir.
Les centres offshore sont plutôt mal classés et perdent du terrain. Seul Jersey, qui abandonne quatre places, reste parmi les vingt premiers. Guernesey est 22e, l’île de Man 24e et les îles Cayman 28e. Les Bahamas sont 59e et perdent onze places.
De façon générale, les écarts entre centres sont faibles, ce qui explique que le classement évolue rapidement d’un semestre à l’autre. Ainsi à peine dix points (soit un pour cent du total possible) séparent Zürich (septième) de Toronto (douzième) de même que Boston (quatorzième) de Paris (vingtième).
En tête du palmarès les différences sont plus importantes mais se resserrent. L’écart entre Londres et Hong-Kong, troisième, est passé de 81 points en mars 2009 à 45 en septembre, pour atteindre aujourd’hui 36 points. Évolution identique avec Singapour, 4e : l’écart n’est plus que de 42 points contre plus de 120 en 2007.
Compte tenu du dynamisme des économies asiatiques, et des incertitudes qui pèsent encore sur Londres et New-York, il n’est pas exclu que le classement connaisse un profond bouleversement dans les prochains mois.