Dans la bataille qui l’oppose à la Commission à propos du plan de restructuration qui lui a été imposé, le groupe ING, spécialisé dans la bancassurance, a marqué des points le 2 mars suite à l’arrêt rendu par le Tribunal de l’UE. La juridiction a révisé à la baisse l’évaluation du montant des aides reçues de l’État néerlandais pendant la crise financière de 2008, estimant que la Commission ne pouvait considérer qu’une modification des conditions de remboursement d’une injection de capital octroyait un avantage à ING par rapport à ses concurrents constitutif d’une aide sans prouver qu’un investisseur privé, placé dans la même situation n’aurait pas accordé ce changement de conditions comme l’ont fait les Pays-Bas. Une bonne nouvelle pour le groupe néerlandais qui va peut être voir alléger ses contraintes dans le cadre du plan de restructuration, selon lui trop sévères. Les marchés semblent se rallier à cette analyse, car le cours de l’action ING Group a grimpé ce même jour de 2,2 pour cent à 6,9 euros à Amsterdam.
Dans le contexte de la crise financière de l’automne 2008, ING a bénéficié de trois mesures d’aide de l’État néerlandais : en octobre 2008, un apport de capitaux de 10 milliards d’euros, puis une mesure d’échange de flux de trésorerie portant sur des actifs dépréciés d’un portefeuille de titres adossés à des crédits hypothécaires octroyés aux États-Unis, estimés à 21,6 milliards d’euros et enfin des garanties publiques sur des dettes engagées par ING pour plus de 12 milliards d’euros. Des mesures qui ont été temporairement approuvées par la Commission, qui en compensation, a soumis ING à l’élaboration d’un plan de restructuration comprenant la scission de ses activités d’assurance et d’investissement ainsi que la vente de son activité de banque en ligne aux États-Unis, ING Direct.
L’augmentation de capital a pris la forme d’une émission de titres hybrides, au prix d’émission de 10 euros sans droit de vote ni de droit à dividende, entièrement souscrite par l’État néer-landais. Opération qui a permis à ING de renforcer son capital de base de niveau 1 de 10 milliards d’euros. Initia-lement, ING pouvait soit racheter les titres à 15 euros par titre, soit décider, au bout de trois ans, de les convertir en actions ordinaires sur la base d’un pour un avec dans ce cas, pour les Pays-Bas, la faculté d’obtenir d’ING le rachat des titres au prix unitaire de 10 euros, plus les intérêts courus.
Pour être en ligne avec des dispositions accordées à d’autres banques néerlandaises, ces conditions ont été modifiées en 2009 de manière à permettre à ING de racheter la moitié des titres au prix d’émission de 10 euros par titre, majoré des intérêts courus, eu égard au coupon annuel de 8,5 pour cent et d’une prime de remboursement anticipé si le cours de l’action ING était supérieur à 10 euros. Ce qui a donc permis à ING de rembourser anticipa[-]tivement 5 milliards d’euros de cet apport en capital au gouvernement néerlandais. Mais la Commission a considéré que cette modification du remboursement constituait un manque à gagner pour les Pays-Bas et donc une aide supplémentaire de 2 milliards d’euros à ING, et a décidé le 18 novembre 2009, d’imposer à ING de réduire davantage son bilan – à un niveau de 45 pour cent. Ce qu’ont contesté devant le Tribunal, l’État néerlandais et ING, soutenu par la Banque centrale néerlandaise.
Or, les juges ont estimé dans leur arrêt que la Commission n’avait pas apporté la preuve que ses allégations : elle aurait dû évaluer cette mesure selon le crible de l’investisseur privé, qui consiste à la comparer à ce qu’aurait consenti un investisseur privé, placé dans la même situation, ce qui ne transparait pas dans sa décision. De plus, elle n’étaye en rien que le rendement compris entre 15 et 22 pour cent, accordé à l’État néerlandais à la suite de la modifi-cation des conditions de remboursement, ne correspondait pas à ce qui pouvait être raisonnablement attendu d’un investisseur privé confronté à une situation similaire, eu égard au contexte de crise de surcroit.
Un revers pour l’exécutif européen, alors qu’enfle la contestation des conditions de restructuration qu’il impose aux banques aidées par les États membres. Bruxelles va « évaluer l’opportunité d’un pourvoi et envisager une nouvelle décision quant au plan de restruc[-]-turation d’ING ». La banque allemande WestLB AG a aussi contesté devant le Tribunal son approche trop stricte en 2009 et ABN Amro a fait de même en 2011.