De plus en plus d’indices révèlent que les grands constructeurs de téléphones et autres tablettes, qui rivalisent pour occuper la paume de notre main à toute heure du jour et de la nuit, se préparent à envahir une autre partie de notre anatomie avec leurs gadgets miniatures : notre poignet. Les horlogers du Jura sont prévenus : leurs belles mécaniques vont devoir rivaliser avec des concentrés de technologie conçus chez Apple, Google, Samsung ou Microsoft et produits en Chine.
Les montres intelligentes de Casio, capables d’emmagasiner 50 numéros de téléphone et d’effectuer des calculs simples, sensation des années 1960, avaient préfiguré cette évolution, mais il faut bien reconnaître que depuis que tous les regards s’étaient portés sur le téléphone nomade, rien de notable ne s’était passé sur le front des appareils hi-tech à porter au poignet. À présent, tout donne à penser que le cadeau typique de Noël 2013 sera un compagnon accroché à notre bras, capable de nous relier à tout et de nous informer sur tout.
À vrai dire, on ne sait pas grand-chose encore de ces nouveaux gadgets, ce qui porte le magazine en ligne spécialisé Ars Technica à lancer: « Attention, peuple de la Terre : le temps est venu de ne plus vous faire écraser par des voitures alors que vous regardez votre smartphone. À l’avenir, vous vous ferez écraser tandis que vous regardez votre poignet ». Le Wall Street Journal a affirmé cette semaine que Microsoft travaille avec ses fournisseurs sur un appareil tactile. Les montres et autres appareils en gestation auront des capteurs pour mesurer la température du corps, la position géographique et obéir aux commandes vocales, fait valoir le quotidien des affaires, qui inclut aussi Nike parmi les firmes intéressées par ce créneau naissant : le fabricant d’articles de sport propose déjà un appareil pour mesurer ses exercices physiques. Le journal, citant une étude de Gartner, chiffre le marché des appareils à porter sur le corps à dix milliards de dollars en 2016, en y incluant des artefacts comme les lunettes de Google, dont on apprend ces jours-ci qu’elles sont déjà en production.
L’ iWatch qu’est censé concocter Apple reste, lui aussi, entouré de mystère. La marque à la pomme avait déjà proposé d’utiliser son baladeur Nano comme montre-bracelet, mais la mode n’avait pas vraiment pris. Aujourd’hui, croit savoir l’agence Bloomberg, une équipe d’une centaine de personnes travaille sur ce projet à l’entreprise de Cupertino. Certains affirment que l’iWatch aura un verre bombé et fera tourner une version du système d’exploitation iOs; les experts s’accordent à dire que le défi le plus difficile à relever pour rendre ces projets viables est celui de leur alimentation électrique.
Le marché qui s’ouvre est d’autant plus difficile à circonscrire qu’on ignore encore quelle sera la combinaison gagnante. Une montre farcie d’électronique et de capteurs, même dotée d’une bonne autonomie, ne sera pas, a priori, idéale pour afficher des contenus visuels complexes ; on imagine donc qu’elle sera couplée à un smartphone ou une tablette, peut-être à des lunettes de type Google Glass, à une oreillette, à d’autres modules intégrés dans nos vêtements ou attachés à notre corps. Sans attendre que les grands s’engouffrent sur ce créneau, une start-up, qui a bénéficé d’un capital-départ de 10,2 millions de dollars, a lancé sur le marché la montre Pebble (le mot signifie caillou ou galet), qui se connecte aux smartphones Android et iPhone. Ce galet futé, vendu 150 dollars, propose notamment l’heure arrondie en mode oral (« onze heures moins le quart ») et sert de télécommande au lecteur de musique du smartphone. Il peut aussi notifier l’arrivée de messages ou de textos. Il résiste à l’eau et a une autonomie de sept jours. Les impatients peuvent donc déjà s’équiper.