Faire du nouveau avec de l’ancien, telle semble avoir été l’idée derrière le dernier projet de Metro qui a relancé, avec son édition collecteur composées de dix remixes de leur dernier EP Too Many Lovers, la mode de la cassette et de la bande magnétique, rehaussé d’un code de téléchargement pour assurer la transition avec l’épopée numérique que nous sommes en train de traverser. Quand la nostalgie rencontre Internet, le retro-futurisme est né, et avec lui l’envie de retrouver l’aura perdue de l’œuvre d’art à l’époque de sa reproductibilité technique.
Ceci explique peut-être également la fascination, voire la frustration mutuelle entre les groupes pop-rock instrumentaux qui investissent les salles de concert dans la sueur d’une musique enfantée grâce au triomphe douloureux du collectif face au créateur solitaire, et les geeks qui trippent derrière les boutons de leurs contrôleurs MIDI pour enchanter les forêts urbaines de la culture club avec leurs structures musicales répétitives tant à la mode aujourd’hui. Si les premiers représentent la victoire de l’humain sur des instruments pourtant démodés aujourd’hui comme la guitare, la basse ou la batterie, les pratiquants de la religion électronique semblent être en possession des outils numériques qui représentent mieux l’époque contemporaine grâce à des tonalités de sons froides, dénuées de toute présence humaine. Étant donné qu’ils travaillent à partir de samples déjà enregistrés, leur performance scénique endormante se limite malheureusement souvent à des déclenchements de boucles et des effets appliqués sur ces samples, la machine l’emportant ici clairement sur l’aspect humain. Il est donc logique que le rock aille chercher du côté de l’électro ce qu’il n’a pas et vice-versa, fidèle à la prémisse de la trahison universelle : « en face c’est toujours mieux ».
Le cocktail Molotov luxembourgeois remixé de Metro se présente pour le coup comme suit : dix artistes issus de la scène électronique du grand-duché se sont réappropriés les quatre chansons de Too Many Lovers, comblé par le track swing et jazzy Never sexy issu des machines de Loose Body Parts. La preuve qu’on peut aussi faire avec la technique froide du sampling une musique chaude, quitte à trahir la facture glaciale des sons électroniques en piochant purement dans des instruments traditionnels.
Une tendance qui se retrouve éga-lement dans le remix de I Know I Can Never Really Make It Up To You Now de Yikez!, qui semble déconstruire la basse, la guitare et la batterie de Metro pour recomposer une nouvelle structure musicale grâce à cette déformation du matériau d’origine. Artaban remixe la même chanson en ne transformant pas la structure musicale de fond en comble, tout en imprégnant le morceau de leur patte planante et entraînante qui renouvelle le morceau d’origine sans le trahir. Une qualité qui se retrouve également dans le remix de Sug(r)cane chez lequel le tempo est pourtant dramatiquement ralenti, la basse originale éliminée et l’habillage sonore réinventé. In Circles, avec son remix de Kraut Controller et Dr.Gonzo [&] Pablo Discobar avec leur nouvelle version de Dr Love, livrent chacun à leur manière radicale des compositions électro qui n’ont rien à voir avec les versions originales plus orientées disco-rock de Metro.
En même temps, la voie musicale empruntée par Metro sur leur dernier EP Too many Lovers se rapprochait déjà d’une musique à base de synthétiseurs et d’éléments plus électroniques, se distanciant lentement mais sûrement du rock traditionnel en rendant hommage avec leur dernier morceau Kraut Controller au courant allemand Krautrock qui s’inspirait autant du rock progressif et psychédélique que du free jazz émergeant, ainsi que des dernières expérimentations minimalistes en musique classique menées à l’époque par Stockhausen en Allemagne et La Monte Young, Terrence Riley et Steve Reich aux États-Unis.
La transition vers un mixtape électro semble donc cohérent avec le projet d’ensemble de Metro. Reste à savoir comment ils vont concilier toutes ces influences sur leur nouvel album, produit par le label allemand Waggle Daggle Records et qui va paraître en automne 2011.