Ce n’est pas encore demain la quille pour Victor Rod, 62 ans, directeur du Commissariat aux assurances, qui s’est engagé à ne « pas quitter le navire » avant que ne soit achevée la réforme réglementaire européenne de l’assurance, connue sous le nom de Solvabilité 2. Sans cesse repoussée en raison de sa complexité et des réticences qu’elle suscite dans le secteur de l’assurance et de son inadaptation à l’évolution du marché, cette réforme, adoptée en 2009, pourrait n’entrer en vigueur qu’en 2015 ou 2016, alors qu’elle aurait dû être transposée au plus tard en octobre 2012 dans les 27 pays de l’UE, pour entrer en vigueur au 1er janvier 2013. Ce qui repousse d’autant le départ à la retraite du capitaine.
Parallèlement, une autre directive, Omnibus 2, est sur le métier pour arrondir les angles de la réforme de la solvabilité des compagnies d’assurance. Le texte bloque au niveau du Parlement européen, alors que se profile le spectre de « Solva 2 » et sa date butoir initiale. Omnibus 2 modifie des aspects les plus controversés de la précédente directive, notamment la date d’entrée en vigueur et les mesures transitoires.
La commission économique et financière du Parlement européen (PE) aurait dû adopter une position en octobre 2011, mais l’a une première fois reportée en novembre, puis en décembre et enfin le 20 janvier dernier, avant de choisir de ne pas trancher, en remettant une nouvelle fois sa décision à la fin du mois de mars 2012. Saisis de plus de 250 amendements, les eurodéputés n’ont pas réussi jusqu’à présent à accorder leurs violons sur un texte unique. Le marché espère qu’ils arrêteront leur position fin mars. Une fois cette étape franchie, les propositions du PE devront repasser devant la Commission euro-péenne et au Conseil des ministres de l’UE. Des arbitrages restent donc possibles avant que le texte ne revienne devant le Parlement pour une adoption en session plénière, en première lec-ture, pas avant l’automne 2012. La directive Omnibus 2 prévoyant les modi-fications de la directive Solvabilité 2, notamment son entrée en vigueur, reviendra ensuite devant l’exécutif européen, qui devra notamment prendre des règlements d’exécution.
Tout devrait être arrêté pour le 31 décembre 2012, et disposer de l’année 2013 pour mettre en place les nouvelles exigences réglementaires, applicables au 1er janvier 2014 en principe. Le plan actuel risque de devenir juste devant les tergiversations du Parlement européen.
Pour ne pas être pris de court et quel que soit le parcours cahotique de la directive Omnibus 2, le Commissariat aux assurances s’apprête dans les prochaines semaines à présenter un avant-projet de loi devant le conseil de gouvernement. « Notre texte est fin prêt, assure Victor Rod, avec des points d’interrogation sur les dispositions transitoires qui ne sont pas encore arrêtées, car elles dépendent de la directive Omnibus 2 ». Le CAA met « la dernière touche à l’exposé des motifs et aux commentaires » des 320 articles de loi. « Ça permettra à nos institutions de préparer leurs travaux, quitte à ce que nous soyons amenés à faire amender le projet de loi en cours », en fonction de l’évolution du dossier Omnibus 2. Victor Rod estime que plus de 70 pour cent du contenu de l’avant-projet de loi devraient être conservés.
Des doutes subsistent sur la date d’entrée en vigueur de Solva 2. Fin janvier, le Financial Times Deutschland en repoussait l’entrée en vigueur à 2016, information aussitôt démentie par la Commission européenne. « Si le Parlement européen n’avance pas, 2016 est une hypothèse un peu trop lointaine, mais 2015 se rapproche plus rapidement, souligne Victor Rod. Nous ne sommes pas au bout du rouleau ».