Angelo Musco nous entraîne dans un monde poétique et irréel partant de petites silhouettes humaines nues. C’est fascinant, à commencer par cet essaim de papillons que l’on voit depuis la rue – et que l’on reverra à la galerie Wild Project à la rentrée, après les congés d’été. Le fond de cette grande photographie (toutes sont des « C-prints » contrecollés sur dibond soit sous verre, soit sous diasec et tirées à cinq ou dix exemplaires) est noir, ce qui fait ressortir la couleur rouge lumineuse des ailes, ponctuées de taches blanches et soulignées de noir.
Quand on s’approche de ce grand format – la plupart font 180 x 180 cm – on se rend compte que les papillons sont composés d’une multitude de corps humains, hommes et femmes, nus donc. Pour ce faire, comme pour les autres œuvres, Angelo Musco, natif de Naples (1973) et newyorkais d’adoption, met méticuleusement en scène ses modèles qu’il a fait poser en vue de ses compositions.
Chrysalis, Ovum, ou encore Cocoon, représentent des éléments liés à la nidation, d’où effectivement Aves, ce qui signifie « plume » en latin, est peut être tombée en virevoltant dans l’air. Les matériaux, les textures de ces éléments de la nature, se rapprochent à tel point de la réalité que l’illusion est parfaite. Pour Cocoon, une des rares photographies plein cadre et donc non cernée de noir, la lumière bleutée est accentuée par le tirage avec une cinquième couleur argentée et le fait que les modèles ont été photographiés en mouvement, sous l’eau, dans une piscine. Les corps saisis dans l’instant arrêté des mouvements de la nage – pour certaines de ses œuvres, Musco assemble jusqu’à 5 000 silhouettes – restituent parfaitement l’idée de quelque chose qui va jaillir.
Vene, que l’on peut voir au premier étage de la galerie Wild Project a des dimensions impressionnantes (240 x 120 cm) et est en quelque sorte l’apogée de cet hymne à la vie. On pourrait presque entendre le bruissement du sang qui circule dans les veines. L’art d’Angelo Musco est ici tellement accompli qu’il se rapproche d’une peinture. On en oublie les efforts et le temps qu’il lui faut pour faire ses prises photographiques, assembler sur ordinateur les corps suivant l’idée de la composition finale et nous donner l’illusion de formes naturelles et savantes à la fois.