Considéré par de nombreux observateurs comme la nouvelle formation à suivre du Luxembourg, le quintet Natas Loves You sort un premier EP introductif, intitulé From Natas With Love. Un premier disque de la part de musiciens qui, malgré une moyenne d’âge ne dépassant guère les 23 ans, ont déjà quelques solides références. Vous prenez trois quarts des regrettés et prometteurs Glitter and Trauma, qui pratiquaient un rock anguleux et sautillant pas très éloigné de Bloc Party, et vous y ajoutez un guitariste et le vocaliste de défunts Holy National Victims (rétro rock un peu pataud).
Cette sortie en elle-même aurait déjà suffi à aiguiser notre curiosité, le fait qu’elle paraisse sur Songs for Ben, la nouvelle structure établie par Fred Baus, programmateur et co-propriétaire du D:qliq, la rend forcément incontournable ! Néanmoins, elle entérine aussi la mise au placard définitive de son ancien label et prend ses distances avec l’électronique, principal point d’ancrage de Grand Duchy Grooves. Ici, outre le recentrage autour de la pop à guitares, capable d’évoluer dans un contexte live, les groupes présents seront des coups de cœur à qui Fred Baus entend faire profiter de son réseau de contacts.
Mais revenons à Natas Loves You. Leur premier single Finished Line a connu une belle carrière radiophonique, les propulsant sur le devant d’une scène à la recherche de chair fraîche. À l’heure où on l’on ne cesse de bouffer du succédané d’années 80, transparaissant dans les resucées plus ou moins (la liste est longue) réussies d’artistes actuels qui repêchent les poses et les sonorités eighties les plus superficielles (pléonasme…), ce quintet a le mérite de plonger, tête baissée, dans la marmite, jamais refroidie, à influences de la fin des 60’s, mais surtout, d’en revenir la caisse pleine de mélodies et d’arrangements millésimés.
La grande majorité de l’EP six titres fleure bon le psychédélisme, versant british avec en point de mire les Beatles, les Zombies voire Badfinger, mais lorgne aussi vers tout un pan de la musique californienne avec Spirit, les Doors et autres Lovin’ Spoonful. Ajoutez-y aux côtés d’orgues et de pianos électriques omniprésents, quelques synthétiseurs tout droit sortis de la bande originale d’Orange Mécanique à l’instrumentation classiquement rock basse, batterie, guitares et le tour est joué ! Cette impression est d’autant plus confirmée par les maniérismes récurrents du chanteur qui conjugue outrancièrement l’arrogance priapique de Jim Morrison, quelques inflexions lennoniennes et, et… Bobby Gillespie de Primal Scream.
On pourrait crier au plagiat, mais la formation fait preuve d’un beau savoir-faire et d’une science des arrangements qui remporte l’adhésion. Le tout regorge de détails finement ciselés et les morceaux font plus que tenir la route. En fait, Natas Loves You ne se fait prendre la main dans le sac que le temps d’un Love don’t bring me down, qui pique de manière éhontée à gauche et à droite dans le répertoire des Fab Four.
Évidemment, il reste à Natas Loves You à se trouver une véritable identité musicale, mais le potentiel présent ne fait que sauter aux oreilles tout au long des six morceaux. On ne peut que leur souhaiter une éclosion musicale à la The Coral (sans suivre toutefois leur funeste carrière), qui labourait jadis le même terreau. Mais d’un autre côté, en faisant abstraction du petit jeu des influences qui tâchent et de l’approche tendance exercice de style par des premiers de classe, ce From Natas With Love se profile comme une belle réussite qui s’écoute avec beaucoup de plaisir.