La belle histoire de l’Eau de Cologne surfine Lozere, fabriquée au Luxembourg depuis trois générations, débute avec le siècle dernier. En 1912, Emile Probst ouvre un grand salon de coiffure pour messieurs, rue des Tramways (aujourd’hui rue Joseph Junck). Choix judicieux, la rue se trouve pile poil en face de la gare. Et le poil, c’est son affaire ! Coiffeur et barbier, il voit défiler dans son salon, une clientèle nombreuse. L’époque le veut, on va aussi chez le coiffeur pour « se faire la barbe ». Coiffure ou rasage, les deux opérations se terminent par un geste rituel, la friction à l’eau de Cologne, et pour les plus coquets un lissage à la brillantine. Voilà les années trente, le salon Emile Probst, précurseur de bien des marques de cosmétiques, fabrique sa brillantine et surtout la bientôt fameuse eau de Cologne qui ne porte pas encore son nom. Déjà, Monsieur Emile voit les quantités en grand. Son épouse veille avec un sens prononcé du commerce et décide de diffuser leurs produits en démarchant les autres détaillants. Vient au monde le petit Alfred Probst. La suite c’est l’Histoire : les Allemands envahissent le Luxembourg, les Probst partent s’installer en France dans un petit village de Lozère. La famille luxembourgeoise s’intègre à merveille à la vie villageoise. Monsieur Emile coupe les cheveux de tous les habitants et, passionné de photographie, il fait le portrait de chacun, constituant ainsi un album inestimable. Vous l’aurez compris, ces Luxembourgeois ont laissé un souvenir très fort à la Lozère – et réciproquement.
De retour à Luxembourg, la guerre terminée, Emile Probst cède son salon, puis crée la société Emile Probst et Fils, fabricant et distributeur de produits pour salons de coiffure. En hommage à ses amis lozèrois, il baptise son eau de Cologne : Lozere. Il choisit les essences, jasmin, citron (avec une part de secret) chez un fournisseur allemand et fabrique lui même le produit avec des instruments qui demeurent inchangés. Emile disparaît, Alfred envoie ses deux fils étudier les rouages du commerce en Allemagne, en Angleterre, et, en 1972, Messieurs Denis et Gilbert Probst reprennent les rênes de la société, devenue Probst sàrl. Dans leur show-room de la rue de Reims, ils conçoivent de superbes dépliants publicitaires, honorant la réputation de la maison. Ce n’est qu’il y a trois ans que les deux frères ont cédé l’entreprise familiale à Diffusion coiffure et beauté, entreprise française. Denis a pris sa retraite et Gilbert exerce encore son métier de commercial chez Probst dcb, dont le local se trouve au 11 rue des joncs à Howald (où Stéphane, un jeune Français, fait encore fonctionner le précieux outillage de Monsieur Emile).
Les amateurs peuvent découvrir Lozere dans les rayons d’Alima, où elle se démarque par sa jolie étiquette estampillée de la couronne logo du « Made in Luxembourg », et arborant le qualificatif « surfine », irrésistiblement rétro. Son odeur ramène tout de suite dans les salons de coiffure d’antan avec leurs fauteuils rutilants et si confortables. Son odeur élégante, fraîche et nostalgique en fait l’accompagnateur idéal pour les journées chaudes d’été.
Lozere existe en plusieurs concentrations d’alcool, quarante, cinquante, 70 et 90 pour cent. À quarante pour cent, on peut s’en servir comme démaquillant, à 90 elle désinfecte, on la retrouve dans les hôpitaux, dans le spray d’eau des coiffeurs. L’utilisation la plus courante est 70 pour cent. Là entre en scène un adorable petit flacon spray au charme art déco qui est un hit absolu dans toutes les maisons de retraite du pays et à la Coopérative de Bonnevoie (un des derniers temples luxembourgeois du bon sens). Son prix entre quatre et cinq euros en fait le cadeau idéal. Il manque des zéros ? Que nenni ! Et c’est bien là l’ultime charme de Lozere, son prix varie de 1,50 (les 250 ml à cinquante pour cent) à sept euros (environ) la maxi bouteille format colonie de vacances. À l’ère de marques qu’il n’est pas besoin de citer, que veut dire ce prix ? Réponse simple : Lozere nous vient d’une époque où l’eau de Cologne participait des gestes de tous les jours, des valeurs d’hygiène sans chichis, d’un souci d’élégance discrète. Un seul flacon de grande marque équivaut à plusieurs années de Lozere.
L’intelligence de ces trois générations de Luxembourgeois, Emile, Alfred, Denis et Gilbert Probst, c’est d’avoir conservé le produit dans toute sa qualité et sa simplicité, jusqu’au prix. Il faut toujours un flacon de Lozere dans la salle de bain, ou le bureau pour le bien-être et les souvenirs. N’oublions pas aussi que l’eau de Cologne a des vertus désinfectantes très pratiques. Pensez à la souris de votre ordinateur, au livre que vous avez acheté dans un vide grenier, au jouet qui a un peu trainé… À vos mains ! À noter, ces flacons ont un petit frère, le dissolvant Lozere, les luxembourgeoises le connaissent bien, il a le format parfait pour glisser dans tous les sacs.