Peu de maisons de bouche peuvent d’enorgueillir d’un tel passé. La Confiserie Namur a été fondée en 1863 par un certain Nicolas Namur et depuis, la famille n’a pas cessé de tenir les rênes de cette maison, jusqu’à aujourd’hui, avec Max Nickels, fier maître pâtissier représentant la sixième génération. Pour encore remonter dans le temps, il faut signaler que Nicolas Namur, formé à la pâtisserie et confiserie à Metz et Paris s’est embarqué pour New York en 1851, à une époque où le Luxembourg était plutôt un pays d’émigration. Contrairement à bon nombre de ses compatriotes, il ne s’installe pas dans le Middle West, mais suit la ruée vers l’or et ouvre, en 1854, une pâtisserie à Sacramento (Californie). À la suite de la guerre de Sécession, il revient au pays et ouvre la première pâtisserie Namur.
Son fils Georges lui succédera et installera la maison à la Grand Rue. Puis c’est le neveu de celui-ci, Georges Paquet qui reprendra le flambeau après s’être formé en Suisse auprès des familles Tobler et Spüngli. Il passera la main à ses enfants et petits-enfants, Max et Jean-Paul Nickels, toujours dans la maison et c’est désormais Max, le fils de Jean-Paul qui est appelé à leur succéder à la tête de l’entreprise qui a grandi progressivement pour compter aujourd’hui sept points de vente (dont un à Metz). Autre date clé dans l’histoire de la maison, c’est depuis 1904, et sans interruption, que la confiserie pâtisserie a reçu le titre de fournisseur de la Cour.
Le bâtiment neuf et les infrastructures modernes dans lesquels Namur est installé à Hamm depuis trois ans n’enlèvent rien à l’esprit traditionnel de la maison ni à son savoir-faire artisanal. Si elle emploie 175 personnes, dont une bonne centaine à la production, c’est bien parce que beaucoup de tâches sont effectuées à la main, minutieusement, patiemment et irremplaçables par des machines. Ainsi, au rayon des orangettes, le nappage traditionnel veut qu’il y ait des éclats d’amandes dans le chocolat. Impossible à les faire passer dans une machine et c’est écorce d’orange par écorce d’orange qu’une ouvrière nappe le délicieux mélange avec un geste sûr et professionnel.
Parce que, à travers sa série d’ateliers, Namur est avant tout une maison de tradition. Qui produit les mêmes gourmandises depuis plus d’un siècle comme l’explique Jean-Paul Nickels : « nous fabriquons ce que d’autres s’évertuent à réinventer comme le macaron et les marrons glacés ». Il faut savoir qu’il y a déjà une centaine d’années, une recette a été trouvée pour utiliser le surplus de blanc d’œuf. « On se sert essentiellement du jaune en pâtisserie. Le blanc sert à faire des meringues et, mélangé à de la poudre d’amande, à des macarons », explique-t-il. La recette a fait florès d’abord en Suisse, où le petit gâteau a pris le nom de « luxemburgerli », avant de s’exporter en France où de grandes maisons en ont fait leur fer de lance. Et ici, c’est toujours la même recette qui fait recette : des coquilles cuites lentement à 160 desgrés, une crème au beurre parfumée, voire colorée, et un montage à la main. Il en sort quelque treize sortes différentes chaque jour. Autant dire que si délicate soit la préparation, le macaron a encore de beaux jours devant lui. Avec les marrons, la démarche est la même, avec la même recette ancestrale. Les fruits sont cuits et confis sur place pendant six mois dans du sirop. Seuls les marrons entiers obtiennent leur droit d’entrer dans les hautes sphères de la confiserie et seront recouverts de sucre glacé, alors que ceux qui sont cassés serviront à la fabrication des Monts Blancs, autre spécialité de la maison. Pas de conservateur, pas d’émulsifiant ou autre ajout : les marrons glacés ne sont proposés qu’en saison et ont une date de conservation très courte.
Depuis trois ans que toute la fabrication a déménagé à Hamm, l’entreprise Namur a dû s’adapter aux exigences modernes. Non seulement elle emploie une personne à plein temps pour prendre en charge le contrôle de la qualité et de l’hygiène, mais elle a dû se doter d’infrastructures normées : un ascenseur dédié au sale (vaisselle, plats et déchets), différent de celui qui prend en charge l’alimentaire, des protections (bonnet, blouse, gants) pour tout le monde et des contrôles réguliers. L’arrivée dans les nouveaux bâtiments a aussi permis la création d’un véritable restaurant et des services de traiteurs. Ainsi, trois cents couverts peuvent être servis au même moment et, pour des événements spéciaux, les salons peuvent accueillir jusqu’à 600 personnes debout (300 assis). Tout le matériel, tables, chaises, mange-debout et vaisselle, est évidemment disponible sur place. Verrines, cuillères, brochettes, pâtés ou quiches, tout est fabriqué dans la maison, selon diverses recettes plutôt difficiles à se faire communiquer. Les pâtés au riesling, qu’ils soient en version mini ou en tranches, sont par exemple, décrits comme des « mélanges de viande hachée et d’épices ». Mais en tout cas, tous les ingrédients sont faits à la maison, y compris la gelée. Et quelque 150 de ces petits délices sortent chaque jour des fours pour être livrés dans les différents magasins.
Parce qu’on s’y connaît aussi en logistique. Une salle est réservée à l’emballage, avec des petites mains qui comptent pralines et chocolats dans les sachets ou les ballotins. « C’est un domaine qui demande de la créativité et de l’innovation pour trouver des emballages originaux et nouveaux qui peuvent s’adapter à différents produits », détaille Max Nickels. En cette période de fêtes, le service est particulièrement actif : cadeaux de fin d’année, Saint-Nicolas et Père Noël, douceurs pour le coin du feu, rien de doit manquer dans l’arsenal du confiseur. Dans le même ordre d’idée, les tournées et expéditions sont précisément organisées pour que chaque point de vente ait ses livraisons matinales et sa fournée de commandes spéciales.
Au fil des ateliers, on découvre successivement divers métiers et savoir-faire jalousement gardés. Une main d’œuvre chouchoutée qui connaît parfaitement son métier. À voir entre autres des créations en massepain, véritables sculptures montées une par une par des mains expertes qui produisent pas moins de 8 000 à 10 000 pièces chaque année ; de la peinture en chocolat pour que les yeux des enfants brillent devant les Saint-Nicolas ou les œufs de Pâques ; pas moins de 50 sortes de pralines différentes; des turbines pour les glaces aux parfums savoureux (avec trois tonnes de fraises livrées par un seul producteur chaque année) ; des gâteaux, des mousses, des viennoiseries, en veux-tu en voilà… Un univers à faire baver un gourmand.