On sait que le galeriste Bernard Ceysson pense à prendre pied sur le Nouveau Continent. En attendant, il ramène des États-Unis de pleins cartons d’œuvres sur papier du jeune artiste Alexander Nolan qu’il expose dans une foisonnante exposition monographique dans sa galerie du Fëschmaart.
Fait d’emblée à signaler, car c’est assez rare actuellement, Nolan (né dans le Wisconsin en 1980), travaille, que ce soit en petit, moyen ou grand format, sur papier. Il utilise indifféremment, et souvent même sur une même feuille, gouache, aquarelle, pastels, lavis, encre, voire même le stylo bille. Des techniques multiples donc pour une œuvre aussi expressive que riche, qui va de saynètes de sa vie privée à la narration du quotidien de tout un chacun, sans oublier des scènes urbaines – ne pas oublier que Alexander Nolan est newyorkais – et des réinterprétations d’œuvres de grands classiques de la peinture européenne.
Apparitions récurrentes, des animaux familiers et quelques autres (cheval, animaux marins) se mêlent aux humains dans des histoires résumées en une image, où très souvent d’ailleurs, les mâles humais comme bestiaux, ont le sexe dénudé. Alexander Nolan, dans sa manière débridée de représenter le petit et le grand monde comme il va, ne semble pas connaître la névrose, même s’il semble savoir ce qu’est une séance chez le psychanalyste.
Ses dessins en noir et blanc et ses lavis sépia, ont une puissance visuelle peut-être plus forte que les grandes pièces colorées, qui font penser parfois à des expressions caraïbes, mais il n’en serait rien : ce serait plutôt du côté des expressionnistes allemands qu’il faudrait chercher ses influences – dixit Bernard Ceysson dans un excellent texte d’introduction.
Curieusement donc, vu ces dires, les grandes pièces représentent et interprètent des scènes de genre de la peinture française de la fin du XIXe siècle : des déjeuners entre amis en pleine nature et du temps de guinguettes, qui ont été célébrés par les Impressionnistes français… On retrouvera aussi – origines de l’art moderne et contemporain oblige – la figure de Picasso, l’artiste total. Pour Nolan, qui semble crayonner tout le temps, Picasso doit être la figure tutélaire par excellence. Sans oublier un très réussi (c’est cette fois un petit format) hommage à Matisse.
Tout instant du jour au coucher du soleil (joli récit d’un voyage à Cassis), chaque instant du quotidien (force scènes de petit-déjeuners), ainsi que des événements beaucoup plus intimes (naissance d’un enfant bien à lui), semblent être des déclencheurs de création pour Alexander Nolan. Qui sait comme peu d’artistes présentés à Luxembourg actuellement, nous montrer qu’il célèbre la vie. Sans se soucier de « grand » art et c’est très fort : foisonnant, humoristique et grinçant.