Il a ouvert son premier commerce à l’âge de vingt ans à Fameck en Moselle et ça fait quinze ans désormais qu’il travaille dans les fruits et légumes, dont six à Luxembourg, dans le quartier de la Gare. Il est de ceux, sinon celui, si on oublie le poissonnier, qui ont contribué à faire de la Place de Strasbourg une bonne adresse pour y remplir son caddie, aussi bien en semaine que le samedi. Ouvert en janvier 2009, Thym Citron est davantage qu’un magasin de fruits et légumes. On y trouve, outre une vaste gamme de produits de la terre, introuvables dans les supermarchés, de l’épicerie fine, des fromages et produits laitiers provenant de petits producteurs lorrains – non, Gérald, qui soutient bien sûr l’idée d’une production locale, n’a pas encore trouvé de fournisseurs luxembourgeois qui pourraient approvisionner ses rayons – et, en saison, des champignons frais, notamment des girolles, que des cueilleurs amènent directement à la boutique. Les amateurs de truffes y trouvent aussi leur bonheur. L’adresse rue de Strasbourg est aussi bien connue des pique-niqueurs à l’heure du déjeuner : soupes fraîches, salades maison, « exception du jour » à réchauffer, mais pas de sandwich, spécialité de la maison voisine, Chez Mauricette. Thym Citron est affilié à l’association Slow Food Luxembourg, qui promeut, même à la pause de midi, des assiettes de qualité, même si on doit les déguster devant un écran d’ordinateur. On doit d’ailleurs à Gérald Polis l’ouverture Place de Strasbourg du traiteur lorrain Chez Mauricette, autre adresse gastronomique pour la charcuterie et les fromages. Comme la tradition le veut chez les primeurs travaillant à la française ou à l’italienne, Thym Citron expose côté rue des produits bons marché et les promotions du jour, la marchandise haut de gamme, qui ne se touche pas, trouvant sa place à l’intérieur de la boutique qui ne désemplit pas, même le samedi lorsque les bureaux sont inoccupés.
Parce qu’il voulait « être à son compte », Gérald Polis, de parents artisans lettreurs, un diplôme de commerce en main et après avoir fait quelques petits boulots dans la charcuterie et accompli son service militaire, fait ses premières armes dans le commerce des fruits et légume à Fameck dans un ancien entrepôt. Le local de cent mètres carrés est sommaire – pas d’eau, juste une arrivée d’électricité –, mais le lieu est situé à proximité immédiate du supermarché Leclerc. Une aubaine. Avec l’aide d’un ami de son père, Régis, avec lequel il s’associera par la suite à Luxembourg, 10 000 francs français de l’époque (1 500 euros) deux balances et un « bon petit prévisionnel », le jeune homme se lance pour se rendre compte, un an après l’ouverture de la boutique, de l’absence de rentabilité de son activité en raison de marges trop serrées et de la concurrence du supermarché. « Quand je commence à perdre de l’argent, j’arrête », souligne-t-il. Il ferme le magasin de Fameck, sans aucun état d’âme, pour en ouvrir un autre rue des Jardins à Metz, 25 mètres carrés au pied de la cathédrale, pas très loin d’ailleurs de la maison mère de Mauricette. Changement radical de clientèle et montée en gamme dans les produits ; Gérald Polis abandonne définitivement le commerce « discount ». Après quatre ans à Metz, il décide de passer la frontière, vend (bien) son commerce et s’associe à trois commerçants et grossistes lorrains pour mettre sur pied Les Jardins de Saint Rémy, donnant comme un air de Provence à la Place de Strasbourg. Le commerce est installé dans les locaux de l’ancienne Banque et caisse d’épargne de l’État. Dans le sous-sol, l’ancienne chambre forte, insonorisée, n’a pas été convertie en chambre froide pour les besoins de l’activité primeur, mais en une salle de musique ou Gérald entreposera sa sono et y stockera sa collection de vinyles. Car, outre sa passion pour les bons produits de la terre, notre homme connaît un rayon dans la musique électronique et, si son nouvel engouement pour le yoga ne lui prenait pas une partie de son temps libre, Gérald se verrait bien animer de temps en temps des soirées luxembourgeoises, sauf que, comme il le dit lui-même, « le monde de la nuit et de l’alcool et celui du yoga ne vont pas bien ensemble ». À la grande époque du Rave, Gérald et sa sœur animaient les soirées branchées de Metz, avant que lui devienne commerçant et végétarien et passe au yoga et elle dresseuse de chiens.
Après que ses associés aient connu des déboires en France et que ses difficultés se répercutaient sur l’activité luxembourgeoise, le jeune homme rompt les relations d’affaires et ouvre Thym Citron, qui compte aujourd’hui sept employés, contre trois à l’ouverture, et est presque devenu trop petit. La cuisine ouverte va être déménagée l’année prochaine pour laisser plus de place aux produits de l’épicerie fine bio et introduire aussi des produits de phytothérapie. Gérald Polis envisage aussi de proposer des cours de yoga et de développer la confection de petits plats frais qui pourront même être livrés.
Thierry Besseling
Kategorien: Künstlerporträts
Ausgabe: 24.08.2012