De : [lt]josée hansen[gt]
À : [lt]gary diderich[gt]
Le onzième numéro de Queesch - «le magazine pour et sur l'autodétermination» - vient de paraître. Après des éditions consacrées à l'Europe, aux demandeurs d'asile et aux réfugiés, à l'amour, au fascisme ou à la musique, ce numéro est consacré à l'art (?=Art). Le choix des sujets est assez éclectique. Qui est l'éditeur du magazine et qui décide des sujets ? Selon quels critères ?
De : [lt]gary diderich[gt]
À : [lt]josée hansen[gt]
Le magazine avec le CD est publié par l'association sans but lucratif du même nom, c'est-à-dire de la Que-esch asbl. L'association est ouverte à tout le monde et se compose actuellement d'un noyau actif de cinq personnes et d'un groupe élargi de vingt jeunes. Mais la collaboration d'édition à édition varie selon la disponibilité et l'intérêt des gens. Chacun, organisation et individu, peut proposer des thèmes pour le dossier comme actuellement «l'art=?» et prochainement l'architecture. À côté du dossier il y a toujours d'autres articles et rubriques qui offrent de l'espace à toute une variété de thèmes, sociaux, culturels et politiques.
Pour faciliter la participation de tout le monde, nous avons installé un forum sur le site Internet www.queesch.lu, où on discute des thèmes à venir. Les critères pour les thèmes sont surtout la question de la quantité et qualité des contributions. Pour un dossier, il faut plus que quelqu'un qui écrive un article, il faut une équipe qui contacte des gens, qui fasse des interviews et qui essaie d'atteindre une approche diversifiée à la thématique. Après, ce sont aussi l'actualité et le feedback des gens sur le forum et dans les réunions qui sont importants. À la fin du compte, c'est lors des réunions de Queesch (annoncées sur le site web) que la décision est prise.
De : [lt]josée hansen[gt]
À : [lt]gary diderich[gt]
Ce concept ressemble fort à celui d'autres magazines, plus traditionnels, comme notamment le Forum, ou plus récents, comme le tout jeune Salzinsel. Qu'est-ce qui vous différencie ?
De : [lt]gary diderich[gt]
À : [lt]josée hansen[gt]
Queesch veut réaliser l'idée de plateforme le plus possible, l'âge, la thématique, la façon et la forme, tout cela varie beaucoup selon l'auteur. Nos «journalistes» ont parfois quinze ans, parfois cinquante et tout le monde a les mêmes possibilités et droits. Nous avons aussi complété le medium «magazine» avec un CD et un site web pour donner l'espace nécessaire à cette diversité. Par conséquent, nous n'avons aucune limitation, sauf que le contenu ne peut pas être discriminatoire. Aussi, la forme d'organisation se veut autogérée, bien qu'il faudrait plus de gens pour que cela se réalise mieux. Ainsi, chez nous, il n'y a par exemple pas de rédacteur en chef.
Par ailleurs, nous n'acceptons que le sponsoring d'entreprises et organisations éthiquement responsables. Toutefois, nous n'arrivons pas à choisir les entreprises avec lesquelles nous devons produire le magazine et le CD, mais au moins, ce sont de petites boîtes, même si elles ne sont pas bio ou coopératives.
En ce qui concerne la concurrence : vis-à-vis du Forum, ce qui nous différencie, c'est certainement la forme d'une part - la mise en page de Queesch est souvent couverte d'éloges - et de l'autre le public : nous touchons un lectorat plus jeune. Salzinsel par contre se concentre sur un domaine, celui de la culture et de l'art, et cela surtout par rapport au contenu, mais aussi en vue du public. Nous voudrions atteindre la plus grande masse, pas à tout prix, mais par de petits pas honnêtes. Nous n'essayons pas de manipuler mais de dire que chacun a son opinion et que c'est intéressant de s'interroger et de s'échanger.
De : [lt]josée hansen[gt]
À : [lt]gary diderich[gt]
Vous venez de parler de sponsoring et des annonces... Comment est-ce que Queesch se finance ? Quel est son tirage ? Depuis quelques numéros, vous êtes en vente en kiosque, pourquoi ? Qui est votre public ?
De : [lt]gary diderich[gt]
À : [lt]josée hansen[gt]
Queesch a profité pendant ses deux premières années de subsides du SNJ (Service nationale de la Jeunesse, ndlr.) et du programme Jeunesse de l'Union européenne, d'une «Initiative Jeunes» et d'une «Mise en réseau» avec l'Infoladen de Trèves. Depuis septembre, ces subsides limités à chaque fois douze mois, sont finis et nous nous finançons de plus en plus de nos propres moyens, la vente, les abonnements et les annonces.
En ce qui concerne les annonces, j'ai déjà évoqué que nous n'acceptons que des entreprises qui s'organisent de façon coopérative et/ou dont l'activité est écologique, sociale ou culturelle. La vente se faisait toujours de façon autogérée, par des points de ventes et des revendeurs à titre individuel, mais cela demande beaucoup d'engagement. Un engagement qu'on est toujours prêt à faire mais il nous manque des gens qui s'investissent. Il faut considérer que Queesch repose sur l'engagement bénévole et que seuls le layout et la coordination administrative sont indemnisés, mais là, on ne peut pas parler de salaire.
Comme nous avons toujours eu la remarque que des gens, même après notre dixième édition, ne nous connaissaient toujours pas, nous avons pris la décision difficile de signer un contrat avec la distribution des Messageries Paul Kraus. Beaucoup de leurs conditions n'entrent pas dans notre philosophie - les invendus sont pour la poubelle, code barre, leur partie du bénéfice,.... Nous ne savons pas encore ce que cela nous apporte pour financer le projet, mais au moins ces 400 exemplaires qui sont dans les librairies ne sont pas dans notre cave et font que les gens nous connaissent.
Au total, nous avons un tirage de 2 000 exemplaires, dont mille sont distribués dans les trois mois qui suivent la publication. Mais Queesch ne se vend pas seulement avec l'actualité. Il est important pour nous que tout le monde, qu'importe ses moyens financiers, puisse acheter le magazine. Certes, on a élevé le prix de vente de trois à cinq euros, mais on a laissé le prix des abonnements en fonction de l'ancien prix au numéro, c'est-à-dire douze euros pour quatre numéros. Et pour ceux qui n'ont pas les moyens financiers, l'abonnement est maintenant à cinq euros pour quatre numéros.
L'abonnement reste la forme la plus rentable pour chacun, Queesch et le public. En ce qui concerne le public, nous pouvons dire que nous touchons plutôt des lecteurs entre quinze et 35 ans mais aussi les gens intéressés aux alternatives dans les domaines de la culture, de la politique et de la société.
De : [lt]josée hansen[gt]
À : [lt]gary diderich[gt]
Une des originalités du concept Queesch sont les CDs compilés d'extraits de disques, voire des inédits de groupes luxembourgeois. Donc vous participez en partie à leur diffusion. Comment sélectionnez-vous ces morceaux ?
De : [lt]gary diderich[gt]
À : [lt]josée hansen[gt]
Ici, comme d'ailleurs pour tout le concept de Queesch, il est essentiel pour nous de réduire la sélection. Nous voulons offrir une plateforme médiatique ouverte qui donne la chance à tout le monde de s'exprimer. On n'a «que» la place pour publier six chansons par disque, mais en fait, tôt ou tard, nous publions tous les groupes qui nous envoient leur chanson. Mais ce n'est pas comme si nous trouvions tous les jours un CD dans notre boîte aux lettres. Alors c'est à nous de chercher des groupes locaux, voire internationaux, qui nous semblent intéressants. Les critères qui décident de la priorité sont l'actualité de l'enregistrement, les moyens des artistes de se publier autrement et notre jugement - par exemple sur le fait si l'intérêt commercial prime l'activité de l'artiste.
Le «line-up» du CD essaye aussi d'être diversifié : rock, punk, électro, pop, hard-core, métal,... La sélection des deux morceaux de groupes internationaux quant à elle se fait souvent en relation avec un concert récent de ce groupe au Luxembourg.
De : [lt]josée hansen[gt]
À : [lt]gary diderich[gt]
Est-ce que vous vous voyez plutôt comme un magazine culturel ou militant, voire politique ? Dans quel sens voulez-vous évoluer dans un paysage de presse luxembourgeoise de plus en plus riche ?
De : [lt]gary diderich[gt]
À : [lt]josée hansen[gt]
Le magazine avec son CD et le site web sont en soi un moyen d'expression, une plateforme d'exprimer son opinion, ses besoins, ses attentes, ses craintes et ses idées. La façon dont ces réflexions et sentiments sont exprimés est le choix de celui qui le fait, de l'auteur, du musicien, du photographe, de l'artiste, etc.
Le magazine était déjà culturel quand la motivation pour l'éditer était principalement politique et il est toujours politique même si le dossier porte sur l'art et que les rubriques culturelles deviennent plus riches. J'espère que le journal ne sera jamais de «l'art pour l'art» ni de «l'action pour l'action» ou «l'intellect pour l'intellect» - tout ça est un tout et doit être en échange et en débat permanent pour évoluer.
Quant à l'évolution du médium : j'espère que de plus en plus de gens utilisent cette plateforme médiatique et l'enrichissent pour favoriser l'échange culturel, social et politique au Luxembourg, mais aussi au-delà du Grand-Duché. Si le contraire se produisait, on devrait arrêter notre activité, nous ne voulons pas créer un besoin qui n'est peut-être pas là. Si, par contre, l'évolution continue comme jusqu'à présent nous devrons tôt ou tard indemniser ou même employer deux personnes, pour la mise en page et pour la coordination administrative (vente, abonnements, subsides, publicités,...). Mais on ne veut pas devenir un journal dont les gens employés sont responsables pour le contenu.