L’année prochaine, le 19 septembre, la radio socioculturelle 100,7 fêtera ses vingt ans d’existence. Mais elle ne sait pas encore vraiment où, ni avec qui. Certes, le beau bâtiment qu’elle partagera avec le Fonds Kirchberg, maître d’ouvrage et propriétaire des murs, avenue Kennedy, sera achevé, comme prévu, pour la fin de l’année. Et le principe de son déménagement de l’actuelle villa de l’avenue Monterey, certes somptueuse mais peu adaptée à son métier, n’est plus mis en doute. Mais le couperet sur l’accord (ou non) par le ministère des Finances d’une enveloppe extraordinaire de quelque quatre millions d’euros d’investissement (soit presque la même somme que ses 4,5 millions de dotation publique annuelle) pour le déménagement et l’équipement des studios ne tombera définitivement que mardi prochain, 2 octobre, lors du dépôt du projet de budget de l’État. Deuxième inconnue : avec qui fêtera-t-elle ? Le mandat du président du conseil d’administration est vacant depuis un mois et demi, et le directeur actuel, Fernand Weides, atteindra l’âge de la retraite à la fin de cette année. Bien qu’il veuille encore achever le chantier du Kirchberg et le déménagement pour partir tranquille, cet état d’attente et son ambiance fin de règne – on ne touche plus à rien pour laisser « au nouveau » la chance d’imposer sa marque –, bloque la radio publique dans le développement de son contenu. En coulisses, les spéculations et les craintes sur cette double succession à la tête de la radio vont bon train : les ministres des Médias, François Biltgen, et de la Culture, Octavie Modert, qui en assurent la tutelle, tous les deux CSV, voudraient-ils reprendre en main une radio fondée à l’époque par le très charismatique ministre socialiste Robert Krieps et dont les actuels directeur et rédacteur en chef sont toujours proches du LSAP ? La « radio rouge » – dont plus personne ne conteste l’existence aujourd’hui, même pas les libéraux – devra-t-elle devenir un peu plus catholique, alors qu’actuellement, ses journalistes et animateurs sont fiers de leur indépendance ?
C’est qu’à droite, sur le spectre médiatique, la radio du groupe Saint-Paul, DNR (Den neie Radio), dont la création remonte également à la libéralisation du paysage audiovisuel par la loi de 1991, est dans de très mauvais draps. « Nous avons fait notre analyse : la radio telle que nous la connaissons aujourd’hui n’a plus d’avenir », confirme sans ambages le directeur général du GSP, Paul Lenert, vis-à-vis du Land, sans pouvoir dire si elle sera complètement abolie (son taux d’écoute oscille autour de la barre des dix pour cent) ou si elle continuera à exister avec un autre format, par exemple purement musical. En tout cas, l’ère de son ambition journalistique, avec une rédaction correctement fournie pour offrir une information aussi complète que possible, est définitivement révolue. Mais probablement que sa grande erreur a toujours été de vouloir être une copie de la chaîne historique RTL Radio Lëtzebuerg, une chaîne privée avec des missions de service public, au point que même les journalistes et animateurs purent faire des allers-retours Kirchberg-Gasperich sans grands problèmes d’adaptation.
Or, avec la crise économique et la chute des dépenses publicitaires qu’elle a entraînée, les ressources rétrécissent pour les chaînes privées. Ainsi, RTL Radio Lëtzebuerg, quarante pour cent de taux d’écoute, dont le responsable Alain Berwick assure que ses ressources sont stables, a entamé une restructuration douce elle aussi, avec des départs plus ou moins volontaires (Kerstin Thalau, journaliste culturelle, remerciée, et Fernand Mathes, station manager, qui part à la retraite), qui ne sont pas remplacés. Christophe Goossens, l’actuel directeur d’Eldoradio, reprendra donc aussi la gestion administrative de RTL Radio Lëtzebuerg, sous la responsabilité d’Alain Berwick et en impliquant au maximum les équipes d’animateurs et de journalistes assure ce dernier. Mais malgré tous ces changements en vue, la radio reste le média chaud, mobile et démocratique par excellence, permettant une utilisation gratuite et beaucoup plus libre qu’Internet ou la télévision. Pour preuve : ses taux d’écoute sont restés relativement stables ces dernières années, alors que l’érosion du lectorat de la presse écrite et celle des téléspectateurs est beaucoup plus prononcée. Pour autant que la qualité de la programmation y est, l’auditoire suit.
josée hansen
Kategorien: Medienpolitik
Ausgabe: 10.08.2012