La politique architecturale à Luxembourg n’est plus toute jeune. En 2002, Erna Hennicot-Schoepges (CSV, alors ministre de la Culture, de l’Enseignement supérieur et de la recherche et ministre des Travaux publics) avait adressé une note à l’attention du Conseil de gouvernement ayant pour but de présenter le programme de politique architecturale – fruit d’une collaboration étroite entre les ministères, l’Ordre des architectes et des ingénieurs-conseils (OAI) et de la Fondation de l’architecture et de l’ingénierie (aujourd’hui Luca) – et avec la prière de faire examiner ce programme par toutes les instances qui en étaient concernées. En 2004, Pour une politique architecturale, texte proposé par le groupe interministériel et interprofessionnel, avait été tiré à 3 000 exemplaires et reste téléchargeable sur internet. Le texte proposait un programme composé de quatorze actions dont la première était l’organisation d’un forum européen des politiques architecturales qui à ce jour en reste la seule action complétée, les autres ayant été entamées mais guère menées à termes.
Pour rappel, et par souci de clarté, le mot politique en son sens plus large comprend un cadre général, une manière d’agir. Une politique architecturale à l’échelle du grand-duché serait pour ainsi dire un cadre et une manière d’agir quant à l’architecture man-made, hand-made, made in Luxembourg. À ne pas confondre avec ACDU, plan d’aménagement général, plan d’aménagement particulier, SUP, règlement sur les bâtisses et compagnie. Plutôt que de se tracasser du normatif, il s’agit de se donner des outils qui permettent d’assurer un environnement façonné de qualité et digne de l’utilisateur malgré les textes normatifs.
On ne s’était pas dit « rendez-vous dans dix ans », en 2005, lors du forum européen des politiques architecturales (Efap-Fepa) organisé à l’occasion de la réunion informelle des ministres de la Culture qui y avaient alors participé lors de la Présidence luxembourgeoise du conseil de l’Union européenne.
Pourtant, contrairement aux prévisions de 2005, en 2015 Luxembourg assure de nouveau la Présidence et les politiques architecturales sont de nouveau à l’ordre du jour dans la programmation officielle avec la conférence internationale Architectural policies 2.0 rethinking built environment policy making in Europe. Combien seront là ? 400 ? 300 ? 200 ? 100 ?
Les 12 et 13 novembre derniers l’on s’est revu sur des sites qui en 2005 étaient en chantier (Rotondes) ou en planification (friches reconverties au Belval) et qui désormais connaissent la routine du quotidien dans un cadre exceptionnel car unique, grâce à la complémentarité entre friches anciennes, patrimoine industriel et création contemporaine.
Quel meilleur cadre pour discuter de politique architecturale ? Des 138 inscrits, les locaux représentaient presque la moitié. Cependant leur présence et leur participation était, hélas, beaucoup moindre. Ateliers et conférences confondus, les locaux n’ont pas dépassé la trentaine. Une trentaine d’individus intéressés après dix ans, voilà la récolte du texte interministériel et interprofessionnel. Le désintérêt n’aurait pu être plus manifeste et c’est d’autant plus dommage que la programmation était intense et inspirante et que les échanges étaient vifs et riches lors des ateliers autour des thèmes proposés. Il aurait été primordial de pouvoir discuter de la place de l’architecture dans les structures publiques et gouvernementales avec des employés et fonctionnaires locaux. Combien d’occasions se présentent aux architectes et ingénieurs du grand-duché de pouvoir s’échanger de vive voix, en direct, doheem, avec leurs confrères européens sur les défis que doivent assumer les professions libérales dans le secteur de la construction ? Comment vivre, travailler et fonctionner en tant qu’architecte et designer, alors que les limites entre les disciplines deviennent de plus en plus floues ? Luxembourg n’avait qu’à gagner en assistant à de telles discussions, car nous n’en sommes qu’à nos débuts, Design Friends est beaucoup plus jeune que Luca et l’OAI (qui vient de s’ouvrir aux architectes d’intérieur, paysagistes etc.)
À quand la prochaine coïncidence de présentation des politiques architecturales du Portugal, de la Croatie, de la Suisse, de la Finlande, Belgique, Danemark, France, Allemagne ? Cela n’arrive qu’une fois tous les dix ans, et s’était arrivé près de chez nous, et nous avons saisi l’occasion, et nous nous sommes faits rares, durch Abwesenheit geglänzt. En anglais missed chances in life, op gudd Lëtzebuergesch domm gaang !
Le mérite c’est l’équipe du Luca qui l’emporte, il l’emporte avec la lourde charge de relancer les architectes, les politiciens et la politique architecturale du grand-duché. Que le Luxembourg soit avec eux.