Le plus difficile, actuellement à la galerie Wild Project, rue Louvigny, c’est d’essayer d’avoir un aperçu des œuvres exposées par la vitrine. Car on ne voit a priori rien de plus que de la pénombre. Une balançoire – blanche par contre, juste derrière la vitre, ne donne pas plus d’indications vers où l’artiste veut nous entraîner, ni une chaise longue qu’on devine tout de même être composée d’une multitude de seins et qui trône au milieu de l’espace. Il faut donc pousser la porte pour s’immerger dans le travail sur le corps d’Alvin Booth. Le photographe, né en Angleterre en 1959, qui vit à New York, présente ici ses pièces les plus récentes, pour moitié photographies, pour moitié sculptures.
On commencera par regarder l’accrochage aux murs, pour mieux comprendre ensuite les pièces disséminées dans la galerie. Il faudra pour ce faire laisser jouer à plein le sens de la vision. Au premier abord, les grandes pièces sous verre ne laissent percevoir qu’un travail sur le noir, appliqué par touches sur l’ensemble de la surface. Booth a utilisé un moyen technique récemment développé qui permet une nouvelle mise en œuvre de graphite. À l’arrière sont disposées des LED et peu à peu, une fois qu’on est habitué à la pénombre, apparaît le sujet des photographies.
Ce sont des corps de danseurs saisis en mouvement. Hommes et femmes, de face, de dos ou de profil, mus par l’envolée. Le mouvement des silhouettes ainsi révélées, renvoie au temps d’exposition long des débuts de la prise de vue photographique quand le flou pouvait accidentellement gâcher une image nette. Ici au contraire, le flou est non seulement recherché par Alvin Booth, mais les parties claires des photographies (en l’occurrence les muscles saillants des corps), prennent, de par le travail graphique, une matérialité proche de la sculpture.
L’esthétique et la sensualité des photographies de la série Nocturne, voulue à la fois photographie, dessin et sculpture par Alvin Booth condensent en fait art et technicité. Aussi est-il plus facile d’aborder la suite du travail, sculptural celui-là, et la série d’objets moulés à même des parties du corps, en silicone : chaise longue seins, tabouret bouches et autres chaussons de danse phallus, que l’on invite les visiteurs de la galerie à toucher. On n’en dira pas plus sinon que les titres, pleins d’humour, mettent la distance nécessaire entre soi et ces objets sexués et fétichistes comme le laisse deviner, au premier regard par la vitrine, la structure de la chaise longue aux tétons...
josée hansen
Kategorien: Zeitgenössische Kunst
Ausgabe: 10.03.2017