Art contemporain

Relever le défi

d'Lëtzebuerger Land du 05.10.2018

Après le « merde alors » de notre ministre des Affaires étrangères à son collègue italien de la Ligue du Nord Matteo Salvini désormais ministre de l’Intérieur, en pleine réunion sur l’épineux débat sur l’accueil européen des migrants d’aujourd’hui, on ira voir d’un autre œil l’exposition de Giuseppe Licari à la galerie Nei Liicht à Dudelange. Elle s’appelle The promised land (titre donc ô combien d’actualité) et présente de manière lisse et plaisante, la suite du travail sur le paysage du jeune Italien commencé en 2013 avec Fluid matter et continué ensuite avec une résidence d’artiste en 2015-2016 à Esch-Belval dénommée Schlak.

Giuseppe Licari a décidément le sens des intitulés. Qu’est-ce qui reste en effet de l’époque de la sidérurgie au Grand-Duché et sur quels fondements bâtirons-nous une nouvelle ère, pour continuer à assurer le bien-être économique au pays ? À Belval en particulier, où rappelons-le, est implantée la jeune université luxembourgeoise, qui a rien moins que l’ambition de devenir le cœur de la Silicon Valley européenne.

Malheureusement, c’est sur des fondements hautement pollués que s’écrit l’avenir de cette nouvelle Terre promise, autrement dit les déchets des processus de fabrication de l’ère industrielle, ce que peu de personnes veulent admettre, politiques autant que citoyens lambda.

The promised land nous invite à regarder en face le retour du refoulé – comment gérer la dépollution des sites contaminés, entre autres destinés à accueillir du logement ? – à travers une série de photographies aussi belles que vénéneuses des résidus de cette première ère moderne du Grand-Duché. Il y a une installation poétique de carottages à travers les couches géologiques du Minette et on peut même fouler de ses propres pieds un tapis de « Schlaken », noir et brillant. Le parti-pris de Giuseppe Licari est de dire aux visiteurs de la galerie Nei Liicht, rappelons-le installée à l’étage de l’ancienne maison de direction de l’usine de Dudelange, que la beauté, ici, est un piège.

Le futur certes viendra, mais comment ? C’est aux hommes qu’il convient d’en prendre conscience et d’agir en conséquence, notamment en sachant regarder ce type d’intervention artistique. Un diaporama, dans l’exposition, projette image après image, la vision d’un lièvre mort. Sa course s’est arrêtée sur le territoire empoisonné des friches industrielles.

Giuseppe Licari : The promised land, exposition curatée par Sofia Eliza Bouratsis, dure jusqu’au
25 octobre prochain ; galerie Nei Liicht, rue Dominique Lang à Dudelange ; ouvert du mercredi au dimanche de 15 à 19 heures ; www.centredartdudelange.lu

Marianne Brausch
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