L’enquête Eurostat du mercredi 14 août montre les prémices de la reprise en Europe. L’office européen de statistiques a, en effet, annoncé une croissance du produit intérieur brut de 0,3 pour cent au cours du deuxième trimestre 2013, aussi bien pour la zone euro que pour l’ensemble des Vingt-Sept. Ces chiffres tranchent avec ceux publiés les mois précédents et font penser à Oli Rehn, commissaire européen en charge des Affaires économiques, qu’« une reprise durable est maintenant à portée de main, mais seulement si nous persévérons sur tous les fronts de notre réponse à la crise ». La prudence reste donc de mise et « les déclarations d’autosatisfaction (seraient) prématurées » ajoute le commissaire sur son blog.
La France et l’Allemagne tirent particulièrement bien leur épingle du jeu, avec des taux de croissance de respectivement 0,5 et 0,7 pour cent. Ce qui, le rappelle Bastien Larue, économiste au Statec, est « susceptible d’avoir un impact positif sur le Luxembourg, parce que se sont ses deux principaux partenaires commerciaux ». Les pays du sud de l’Europe enregistrent également des améliorations encourageantes. Le Portugal réalise, en effet, une hausse de son PIB de 1,1 pour cent. Ce chiffre, le meilleur depuis trois ans, montre que le pays sous assistance financière internationale est sorti de la récession.
L’Espagne et l’Italie, quant à elles, sont toujours dans le rouge avec des performances négatives de -0,1 pour cent pour la première et -0,2 pour cent pour la seconde, mais on remarque un ralentissement sensible de la contraction de l’activité dans les deux pays. Les mauvais élèves de l’Europe sont donc en train d’amorcer une reprise économique. À l’inverse, certaines des économies du nord de l’Europe voient leur PIB marquer une croissance inférieure à la moyenne européenne (0,1 pour cent en Belgique) ou même se contracter (-0,2 pour cent aux Pays-Bas). La dichotomie Nord/Sud, bons/mauvais élèves qui semblait s’imposer depuis le début de la crise de l’euro est donc édulcorée par ces nouveaux résultats économiques.
Ce constat était inattendu, tout comme l’était le rebond de l’économie européenne au deuxième trimestre lui-même. Pour Philippe Ledent, senior economist à ING, trois facteurs principaux expliquent cette embellie : « Il y a d’abord le facteur extérieur. Le contexte économique global s’améliore. Cela explique notamment les progrès des exportations ». La reprise américaine n’est pas le moindre de ces facteurs favorables à l’amélioration des échanges internationaux. « En France et en Allemagne, on observe également un rebond de la consommation des ménages » poursuit l’économiste. L’Insee a en effet estimé que les dépenses de consommation des ménages s’étaient accélérées (+0,4 pour cent) sur la période en France après un recul de 0,1 pour cent. Enfin, « on peut noter une amélioration de la confiance. À partir des mois d’avril/mai, on a commencé à observer des signaux positifs, un retour à la confiance progressif », a ajouté Philippe Ledent.
Pour l’économiste d’ING, l’optimisme se mêle à la prudence : « Il s’agit bien de l’amorce d’une reprise économique. Mais pour que celle-ci soit entière, il faut une amélioration de l’ensemble des indicateurs économiques. Ce n’est pas encore le cas. Notre situation est fragile. Tous les facteurs se mettent en place pour la reprise, mais un choc négatif pourrait casser cette embellie ». Des tensions autour du budget aux États-Unis en septembre ou encore la résurgence de dissensions en Europe sur des sujets actuellement différés jusqu’aux élections allemandes pourrait donc porter un coup fatal à la croissance européenne.
D’autant plus que la précarité de celle-ci ne fait nul doute. Si les 0,3 pour cent de variation haussière du PIB au second trimestre constituent une réelle amélioration par rapport aux mois précédents, les résultats du trimestre n’en demeurent pas moins inférieurs de 0,7 pour cent à ceux du même trimestre de l’année précédente. Et un effet de rattrapage est à craindre, notamment dans le secteur de la construction qui a été sous pression au premier trimestre du fait des conditions climatiques rigoureuses. Il n’y aura donc pas de miracle. « On n’attend pas de grand boom mais une reprise progressive susceptible d’être moins forte au troisième trimestre », estime Bastien Larue. Par ailleurs, « la reprise met toujours longtemps à se manifester sur l’emploi. En général, il y a un décalage de trois ou quatre trimestres », ajoute-t-il.
Au Luxembourg, « il y a eu un redressement des enquêtes de conjonctures comme pour la zone euro », affirme l’économiste du Statec. Seulement voilà, pour connaître les performances du grand-duché au second trimestre 2013, il va encore falloir patienter. Contrairement à la majorité des pays européens, les chiffres ne sortiront qu’en octobre. Les premiers signaux perçus par l’institut de statistiques estiment que la situation dans le secteur de la construction s’est améliorée alors qu’en revanche, l’industrie ne montre pas de signe de reprise. Quant aux services, trop peu d’indicateurs sont disponibles au second trimestre pour évaluer la vitalité du secteur. « Un point positif pour le Luxembourg, c’est la bonne tenue des marchés financiers dans la zone euro. Aucune crise n’a éclaté dans la zone contrairement à ce qui s’est passé l’année dernière », indique Bastien Larue, soulignant que si les banques n’ont pas atteint les résultats escomptés au Luxembourg, les autres acteurs financiers ont, eux, connu une progression intéressante.