Filiale de CLT-Ufa, Broadcasting Center Europe (BCE) doit son succès sur le marché libéralisé des télécommunications en fait aux lenteurs luxembourgeoises. Grâce à ses faisceaux hertziens, BCE offre une réponse rapide et flexible au manque d'infrastructures concurrentes à celles des P[&]T. Or, en même temps, BCE doit dès maintenant réfléchir à comment consolider sa place sur le marché une fois que l'offre en fibres optiques viendra concurrencer ses antennes radio.
BCE est le résultat de la « filialisation » des services techniques de CLT-Ufa. Les 220 salariés s'occupent en premier lieu de services connexes à la diffusion de programmes de radio et de télévision. Devant l'opportunité offerte par la libéralisation des télécommunications, on s'est toutefois dit au Kirchberg qu'il pourrait être intéressant de mettre à profit les expériences en communication par ondes hertziennes de la maison.
Peu à peu sont ainsi né toute une série de services. D'abord la communication point-à-point par faisceaux hertziens. Vous avez besoin d'une ligne louée entre vos bu-reaux à Luxembourg et votre maison-mère à Francfort ? Les P[&]T vous sont soit trop chers, soit vous avez besoin d'une connexion redondante pour des motifs de fiabilité ? BCE peut vous installer les antennes nécessaires à une connexion 34 Mb en 19 jours ouvrables et vous trouvera la connexion via fibre optique - BCE collabore avec Cegecom, Co-de-net, la SNCB en Belgique ou en-core VSE-Net en Allemagne - entre le Grand-Duché et le lieu de destination.
Une seconde offre de BCE est la communication par satellite selon le système V-Sat. Utilisée dans les transmissions télévisées, cette technique peut aussi l'être pour un réseau privé international. BCE opère ainsi pour un client luxembourgeois un réseau liant une dizaine de sites à travers l'Europe avec le siège au Grand-Duché. La troisième technologie utilisée est la boucle locale radio, ou wireless local loop (WLL), qui offre une alternative aux lignes téléphoniques des P[&]T pour le fameux last mile entre les réseaux internationaux des différents opérateurs et les bureaux du client final.
Pour cette dernière offre, BCE prévoit d'ailleurs de collaborer avec FirstMark, qui prévoit de construire un réseau WLL à couverture nationale. BCE dispose aujourd'hui de deux stations WLL qui fonctionnent en phase test, une sur le bâtiment Tour au Kirchberg, une autre à Dudelange. L'une ou l'autre station pourrait suivre. Mais dans le cadre de la collaboration avec FirstMark, le réseau propre de BCE devrait rester limité. Les technologies utilisées par BCE et FirstMark ne sont d'ailleurs pas les mêmes. L'offre de BCE s'adresse aujourd'hui aussi bien aux clients finaux qu'aux autres opérateurs. Avec le WLL, BCE dispose d'une solution pour les connexions en dessous de 2 Mb/s. Les faisceaux hertziens couvrent le spectre entre 2 Mb et 155 Mb. Parmi ses clients, on trouve ainsi aussi bien les chaînes RTL, la Commerzbank et Eurocontrol que Global One, Codenet, UU-Net et KPN. Avec les connexions en fibre de Cegecom et Coditel reliant le Luxembourg, après la France, dans un futur proche également avec la Belgique, la position concurrentielle de BCE s'affaiblira sans doute. Même si les faisceaux resteront une solution idéale de back-up.
BCE prévoit dès lors le lancement de nouveaux services. En collaboration avec les équipes informatiques de CLT-Ufa, on veut ainsi offrir des services Internet aussi bien pour les chaînes RTL que des clients externes. On collabore avec Intelligent Networks, un desaster recovery center, et prévoit d'aller de plus en plus en direction de services intégrés, ce qu'on appelle aussi un application service provider (ASP). Nico Binsfeld, responsable de la division télécom de BCE, espère établir au siège de CLT-Ufa au Kirchberg un « Telehouse » qui deviendrait le point d'interconnexion de l'ensemble des opérateurs de réseaux présents au Luxembourg.
Les P[&]T sont présents pour des raisons historiques, Codenet dispose de même d'un Pop chez BCE alors que Cegecom s'apprête à se connecter via fibre. D'autres opérateurs internationaux pourraient suivre. Pour BCE, c'est une bonne occasion pour louer des emplacements et offrir ses services techniques. Pour les opérateurs, c'est la possibilité de s'interconnecter rapidement, et selon des standards communs, aux autres réseaux.
BCE compte parmi les rares opérateurs à disposer de ses propres équipes sur place pour l'installation de son réseau. D'autres, soit sous-traitent ces travaux, soit dépendent d'équipes venant d'autres filiales du groupe. Fort d'une vingtaine de salariés dans le domaine des télécom et transmissions, BCE a réalisé en 1999 un chiffre d'affaires de 70 millions de francs dans les télécommunications. Pour l'an 2000, ce chiffre devrait tripler.