Voilà un Luxembourg différent pour la classique exposition d’été au Ratskeller. Tel est le propos de Luxembourg 360°, un tour d’horizon où l’on voit majoritairement les quartiers périphériques, ceux qui ont le plus changé.
La Photothèque de la Ville de Luxembourg a puisé dans son fonds de photographies léguées par des particuliers et qui ont été prises principalement par des non-professionnels. On peut y voir Cessange et Gasperich, structures villageoises avec des champs où paissent des moutons. Les pâtures sont bordées de murets. Ce n’est pas le sujet central des photos : un petit garçon pose en costume du dimanche avec des chevaux de labour, deux cyclistes également, qui sont habillés pour la photo avec vareuse à col marin et chapeau de paille d’été. Ces photos datent des années 1920 à 1940. On les regarde aujourd’hui, mi-amusé, mi-nostalgique.
Les maisons de Pulvermuhl et Muhlenbach ont d’immenses jardins potagers. Le public assiste à un meeting aérien à Belair, dont on n’aperçoit au fond que la silhouette de l’avenue Guillaume et de la rue Albert Ier. On suppose qu’au quartier Giorgetti on se chauffait au charbon, puisque le dépôt à Hamm, (avec le patron et les employés) vaut une photographie. Un tracteur remonte la Côte d’Eich avec son chargement pour l’hiver : les maisons avaient une cave à patates… La périphérie de Luxembourg n’était pas que paysanne. L’usine sidérurgique de Dommeldange était aux portes de la ville. Elle fut la première du pays, avant même celles du Sud (et valait son D à l’Arbed).
Hollerich aussi est une commune industrielle. La première gare est construite sur son territoire. On se rappellera que c’est grâce à cette proximité que les Champagnes Mercier et l’industrie métallurgique s’y installèrent. Intéressants sont les clichés pris aux environs de 1900 de la gare en bois, du réseau des voies ferrées, des rotondes et autour, un mixe d’immeubles simples quand d’autres ont déjà fière allure urbaine… La deuxième gare, (l’actuelle), est en pierre, mais sans sa tour d’horloge. On l’apprend grâce à la collection Marcel Weydert, exposée au format carte postale dans des vitrines. On voit les fondations du siège de l’Arbed et le terrain vague du Rosegärtchen, l’octroi de la Place de Paris au début des années 1920. Puis Hollerich cessera d’être une commune indépendante.
Cette collection permet de retracer l’histoire urbanistique et commerciale. Voici un rare cliché de la construction de la Caisse d’Épargne en 1911. La même année, un cafetier et les serveurs posent sur un pas de porte derrière une automobile Daymler qui a fait le Tour de France. Dès les années 1920, on fait de la publicité sur les camionnettes de livraison, il y a des affiches publicitaires sur les horloges de rue. Les attractions sportives sont sensationnelles : saut de l’ange dans l’Alzette au Grund, course de moto avec side-car au Findel. Une course de vélo affronte les pavés de la Grand-Rue, il existe un vélodrome à Belair,..
Les décennies qui suivent vont marquer une véritable rupture : à partir des années 1950, on troque la vie de labeur pour la vie de bureau (la façade du nouveau siège des CFL est en construction), l’éclairage des cinémas est au néon (la rotonde et l’escalier théâtral de l’Eldorado). La voiture est un objet de fierté et le garage Citroën s’appelle « de l’Étoile ». Rétrospectivement, on se dit que c’était de mauvais augure.
Luxembourg 360° c’est tout cela, dans un accrochage parfois hasardeux. Il n’empêche… Batty Fischer, en 1890, photographiait la merveilleuse terrasse des Arquebusiers au-dessus de la Pétrusse qui serait aujourd’hui un must. La leçon de photographie à la chambre, au bout de la rue Saint-Ulrich, vers 1910 inaugurait un loisir plus que centenaire. Et la silhouette de ce monsieur en costume et chapeau noir, accoudé à un arbre à l’avant-plan, devant le panorama de la ville, est-il Camille Aschmann, l’ancêtre d’une lignée de photographes professionnels?