Leonor Antunes, artiste portugaise, née en 1972 à Lisbonne, qui vit à Berlin, propose au Pavillon Leir du Mudam, une déambulation entre « des intervalles, des vides et des jonctions ».
Ieoh Ming Pei a dessiné la coupole de verre du Pavillon en référence aux échauguettes de l’occupation espagnole. Puis, l’architecte a classiquement disposé les murs suivant la forme géométrique de l’octogone. Enfin, en héritier de la culture chinoise, il inclut la perspective de l’extérieur par une ouverture parfaitement axée. Leonor Antunes joue là, d’un vocabulaire et des matériaux simples : acier, corde, cuir et laiton. C’est la dernière en date de ses mises en espace rigoureuses Joints, voids and gaps. Mais les cordes à nœuds qui dansent sous nos yeux, dialoguent en harmonie avec l’escalier sculpture hélicoïdal et sa rampe organique. On les voit à travers des rideaux d’autres cordes, verticales qui dessinent comme une ondée.
Leonor Antunes a doublé la base de la verrière en y installant une structure métallique également octogonale, d’où pendent les rideaux de cordes en coton clair tressé, alourdies à l’extrémité de tubes en laiton. Les cordes à nœuds, gainées de cuir clair, gris et noir, descendent en grappes, suspendues à des filins, comme des cintres d’une scène de théâtre. Voilà pour la technique. C’est tout et c’est une sensation esthétique visuelle qui peut se suffire à elle-même. C’est vibrant les jours de soleil, juste ponctué de quelques points lumineux par mauvais temps.
On peut aussi explorer l’œuvre autrement. Revenons à la passerelle. Flyer à la main, on enrichira sa visite de l’arrière-plan culturel du milieu du 20e siècle moderniste, auquel l’artiste se réfère. On commencera avec l’architecte Franco Albini. La structure en acier se réfère à une installation au Palazzo Grassi à Venise en 1952. Leonor Antunes a exposé une série joints, voids and gaps l’année dernière, dans la résidence minimaliste de l’architecte italo-brésilienne Lina Bo Bardi, la Casa de Vidro (1950-51). Puis, on marchera, puisque Leonor Antunes en a fait une projection agrandie au sol (le linoleum en toile de jute enduite à l’huile de lin), comme dans une œuvre de l’artiste brésilienne Lydia Clark, Modulated surface, version 1 des années 1950. Les luminaires créés par Leonor Antunes, posés avec précision sur les lignes entre les surfaces, sont leurs lignes verticales. Et les nœuds des cordes, tressées, entortillées ? Mira Schandel disait, au milieu des années 1960, que ses Petits riens étaient « une tentative d’immortaliser les instants fugaces et de donner du sens aux choses éphémères ». Belle référence pour la recherche de Leonor Antunes, à la fois très naturelle et très pensée.