Avec un taux de chômage moyen au-dessus de dix pour cent et une recession persistente, l’Union européenne doit trouver rapidement des solutions pour sortir de la crise et mobiliser tous les acteurs autour d’une stratégie claire. C’est l’objectif de la communication intitulée Vers une reprise génératrice d’emplois, publiée le 18 avril par la Commission européenne, qui rescence ses propositions pour sortir de l’ornière. Certaines d’entre elles – celle notamment préconisant d’instaurer un salaire minimum national – ne manqueront pas d’irriter bon nombre d’États soucieux de protéger leur compétence exclusive en matière de politique sociale et d’emploi. Pour le commissaire en charge de l’emploi, des affaires sociales et de l’inclusion László Andor, « les taux de chômage actuels dans l’Union sont spectaculaires et inacceptables, et la création d’emplois doit devenir une vraie priorité européenne.»
Dans les recommandations pour le moyen et le long terme qui ne sont pas contraignantes, la Commission associe tout particulièrement les partenaires sociaux et met, en premier lieu, l’accent sur la création d’emplois liés à la demande. Elle privilégie des salaires « décents et durables » et met en garde contre le piège des bas salaires. Et fait particulièrement marquant, elle souligne pour la première fois que la mise en place d’un salaire minimum constitue un moyen de lutter contre la pauvreté et d’améliorer la qualité des emplois. Elle rejoint en cela la ligne adoptée par le Parlement, qui a voté le 20 octobre 2010 une résolution en ce sens. Bruxelles souligne par ailleurs qu’une différenciation de salaires minimums par branches – négociés avec les partenaires sociaux – peut contribuer au soutien de la demande de travail. « Nous reconnaissons que cela fonctionne, mais n’en faisons pas une obligation », insiste le commissaire. Les propositions soulignent aussi l’intérêt de la modération salariale « pour certains secteurs ou certains États membres ».
Dans l’UE, l’Autriche, l’Allemagne, l’Italie et les pays scandinaves ne disposent pas de revenu minimum obligatoire, bien que la plupart des travailleurs de ces pays (70 pour cent en Allemagne et en Norvège et près de 100 pour cent en Autriche et en Italie, si on exclut les travailleurs irréguliers) sont couverts par des accords sectoriels négociés collectivement.
L’exécutif européen suggère entre autres mesures pour consolider les politiques nationales de l’emploi la mise en place d’aides à l’embauche et aux personnes souhaitant se mettre à leur compte. Elle préconise aussi la réduction de la pression fiscale sur le travail pesant sur les entreprises perçu comme un « instrument privilégié pour renforcer l’offre de travail », au profit de taxes environnementales (sans incidence budgétaire), ce qui fait déjà grincer des dents dans les rangs des partis de gauche. Elle dessine encore des pistes en vue d’exploiter le potentiel élevé de création d’emplois de secteurs prometteurs, tels que celui des soins de santé et des technologies de la communication et l’information ou de l’économie verte, qui a lui seul pourrait générer 20 millions d’emploi d’ici 2020.
La Commission prône en second lieu des pistes d’une réforme visant à restaurer le dynamisme des marchés du travail, qui soient plus inclusifs et axées notamment sur une meilleure flexibilité interne (à travers des mesures temporaires de chômage partiel, par exemple) et la garantie des types de contrat adaptée pour prévenir l’abus des contrats atypiques. Elle met aussi l’accent sur les actions permettant d’accroitre les compétences.
Ensuite, pour créer un marché du travail européen à part entière, Bruxelles propose de supprimer les obstacles à la mobilité, d’améliorer la transférabilité des pensions et le sort fiscal des travailleurs frontaliers et de faire du portail de recherche d’emplois EURES un outil de recrutement d’envergure européenne.
Enfin, elle envisage de renforcer la coordination et la surveillance politiques de l’emploi à l’échelle de l’UE.
Outre la communication, ce « paquet emploi » s’accompagne de neuf documents de travail des services de la Commission plus ciblés. Ce dispositif fera l’objet de débats lors du prochain Conseil Emploi et Affaires sociales des 27 et du prochain sommet européen des chefs d’État et de gouvernement en juin. Il sera en outre examiné en profondeur à l’occasion d’une conférence de haut niveau début septembre.